Un groupe de 43 agriculteurs pakistanais de la région du Sindh a engagé une action en justice contre deux des plus grandes entreprises allemandes, RWE et Heidelberg Materials. Ils les tiennent pour responsables des dommages causés par les inondations dévastatrices de 2022. Les plaignants réclament une reconnaissance de responsabilité et une compensation pour la perte de leurs récoltes de riz et de blé, estimant les dommages à un million d'euros.
Points Clés
- 43 agriculteurs pakistanais du Sindh poursuivent RWE et Heidelberg Materials.
- Les plaignants réclament 1 million d'euros pour les pertes subies lors des inondations de 2022.
- RWE et Heidelberg Materials sont parmi les entreprises les plus polluantes d'Allemagne.
- Les inondations de 2022 ont déplacé 33 millions de personnes au Pakistan.
- Cette action s'inscrit dans une nouvelle vague de litiges climatiques transfrontaliers.
Inondations de 2022: Un désastre national
En 2022, le Pakistan a été le pays le plus touché par les événements météorologiques extrêmes, selon l'Indice mondial des risques climatiques. Des pluies intenses ont inondé un tiers du pays. Ce désastre a coûté la vie à au moins 1 700 personnes. Il a aussi déplacé 33 millions de citoyens et détruit de vastes étendues de terres agricoles. Les pertes économiques sont estimées à près de 30 milliards de dollars.
Chiffres Clés
- 1 700 personnes décédées lors des inondations de 2022.
- 33 millions de personnes déplacées.
- 30 milliards de dollars de pertes économiques.
- Un tiers du Pakistan a été inondé.
La région du Sindh a subi le plus lourd tribut. De nombreux districts sont restés sous l'eau pendant plus d'un an. Durant cette période, les plaignants ont vu leurs terres complètement submergées. Ils ont perdu au moins deux récoltes de riz et de blé. Ces agriculteurs subissent des conséquences économiques et personnelles importantes.
Les entreprises ciblées et leurs émissions
RWE, une entreprise énergétique, et Heidelberg Materials, un producteur de ciment, sont pointées du doigt. Elles figurent parmi les entreprises allemandes les plus polluantes. Selon de nouvelles données de l'Institut de Responsabilité Climatique, RWE est responsable de 0,68% des émissions industrielles mondiales de gaz à effet de serre depuis 1965. Ces émissions proviennent de sa production de combustibles fossiles. Heidelberg Materials est quant à elle responsable d'au moins 0,12% des émissions mondiales via sa production de ciment.
« Ceux qui causent les dommages devraient aussi les payer. Nous, qui avons le moins contribué à la crise climatique, perdons nos maisons et nos moyens de subsistance pendant que les entreprises du Nord riche continuent de faire des profits. »
Un porte-parole de RWE a déclaré ne pas avoir d'informations supplémentaires au-delà de celles rapportées par les médias. L'entreprise n'a donc pas pu commenter l'affaire. Heidelberg Materials n'a pas encore répondu aux sollicitations.
Une nouvelle vague de litiges climatiques
Cette action en justice pakistanaise s'inscrit dans une tendance croissante de litiges transfrontaliers liés aux dommages climatiques. La semaine dernière, un groupe de survivants de typhons aux Philippines a annoncé son intention de poursuivre Shell devant un tribunal britannique. En septembre, un tribunal suisse a tenu sa première audience dans une affaire contre la cimenterie suisse Holcim, portée par quatre habitants de l'île indonésienne de Pulau Pari.
Contexte Juridique
Les tribunaux européens se montrent de plus en plus ouverts à entendre et à statuer sur les plaintes déposées par des victimes de catastrophes climatiques. Cette évolution marque un tournant dans la jurisprudence internationale, permettant aux communautés affectées de chercher réparation.
L'équipe juridique des agriculteurs pakistanais espère tirer des leçons d'un précédent procès climatique, également intenté contre RWE. Dans cette affaire, le guide de montagne Saúl Luciano Lliuya n'avait pas pu prouver que sa maison était directement menacée par une inondation glaciaire. Cependant, le juge avait confirmé que les entreprises pouvaient théoriquement être tenues responsables des dommages climatiques dans le cadre de procédures civiles devant un tribunal allemand.
Surmonter les obstacles de preuve
En se concentrant sur les dommages passés plutôt que futurs, l'équipe juridique des agriculteurs pakistanais vise à contourner les défis de preuve. Elle soumettra des études démontrant l'impact du changement climatique anthropique sur les régimes de précipitations. Ces études incluront spécifiquement les inondations de 2022 au Pakistan et dans la région du Sindh.
Clara Gonzales, co-directrice du programme entreprises et droits de l'homme au Centre européen pour les droits constitutionnels et humains, qui soutient également l'affaire Holcim, exprime un espoir. Elle souhaite faire progresser la jurisprudence.
« La crise climatique n'est plus une menace théorique ; c'est une réalité présente. La diplomatie a peut-être échoué pour les communautés affectées, mais l'État de droit devrait être de leur côté. Il est temps de tracer une ligne claire : les grandes entreprises carbonées ne devraient pas échapper au principe du 'pollueur-payeur'. »
Cette action en justice représente un effort significatif pour tenir les grands émetteurs responsables de leurs contributions au changement climatique. Elle pourrait établir un précédent important pour de futures affaires similaires à travers le monde.





