L'administration Trump a ordonné l'arrêt des travaux du projet éolien offshore Revolution Wind en août, invoquant des préoccupations de sécurité nationale. Quelques semaines plus tard, un juge fédéral a annulé cet ordre, permettant la reprise de la construction. Ce revirement rapide met en lumière les fragilités de la politique anti-éolienne de l'administration et pourrait encourager d'autres entreprises à contester les mesures visant à freiner le développement des énergies renouvelables.
Points Clés
- L'administration Trump a ordonné l'arrêt du projet Revolution Wind pour des raisons de sécurité nationale.
- Orsted a contesté cette décision en justice, citant des pertes financières potentielles de plus d'un milliard de dollars.
- Les allégations du gouvernement sur l'impact radar et les émissions électromagnétiques ont été contredites par des preuves antérieures d'approbation militaire et de la NOAA.
- Un juge fédéral a levé l'ordre d'arrêt, permettant au projet de reprendre.
- L'incident révèle des failles dans la stratégie de l'administration contre l'énergie éolienne.
L'arrêt surprise du projet éolien
Le 22 août, le Bureau de la gestion de l'énergie océanique (BOEM) a ordonné l'arrêt immédiat de la construction du projet éolien offshore Revolution Wind. Le géant danois de l'éolien, Orsted, avait déjà réalisé plus de la moitié des travaux. La lettre d'une page du BOEM justifiait cette décision par des préoccupations liées à la protection des intérêts de sécurité nationale des États-Unis et à la prévention des interférences avec les usages raisonnables de la zone économique exclusive, de la haute mer et des mers territoriales.
Cette décision est intervenue alors que le projet avait reçu ses permis finaux en 2023. L'administration Trump avait, dès le premier jour de son mandat, ordonné un examen général de l'industrie éolienne offshore. Cette initiative s'inscrivait dans une politique plus large visant à freiner le développement des énergies renouvelables.
Un fait important
Le projet Revolution Wind devait fournir de l'électricité à trois États : le Connecticut, le Rhode Island et New York. Son arrêt temporaire a donc eu des implications importantes pour l'approvisionnement énergétique régional.
La riposte juridique d'Orsted
En réaction, Orsted a rapidement déposé une plainte contre le gouvernement américain. L'entreprise a demandé une injonction préliminaire contre l'ordre d'arrêt. Selon Orsted, l'administration Trump avait agi de manière arbitraire, en violation de l'Administrative Procedures Act. Cette loi exige que le gouvernement justifie ses décisions par des raisons sensées.
Les enjeux financiers étaient considérables. Orsted a souligné que l'entreprise d'installation des câbles n'avait qu'une fenêtre de disponibilité limitée avant d'être engagée sur d'autres projets jusqu'à la mi-2028. Un retard prolongé aurait pu entraîner l'annulation du projet et la « cessation de l'entreprise », avec des coûts estimés à plus d'un milliard de dollars. Peu après, les procureurs généraux du Connecticut et du Rhode Island, deux des États bénéficiaires de l'électricité de Revolution Wind, ont également déposé des recours.
« À ce jour, Revolution Wind n'a jamais reçu d'avis ou d'indication qu'il n'avait pas coordonné ses activités offshore avec le DOD, ou que l'US Navy ou le DOD avaient des préoccupations persistantes concernant la coordination en cours », a déclaré Edward LeBlanc, responsable des affaires maritimes chez Orsted.
Les arguments de la défense et les contre-preuves
L'administration Trump a renforcé ses allégations concernant la défense nationale. Les fonctionnaires ont affirmé que Revolution Wind aurait un impact négatif sur la détection radar et entraînerait des émissions électromagnétiques dangereuses. Ils ont également soutenu que les préoccupations du Département de la Défense (DOD) avaient été ignorées ou outrepassées lors du processus d'examen du projet en 2023.
Adam Suess, secrétaire adjoint par intérim pour la gestion des terres et des minéraux au ministère de l'Intérieur, a déclaré sous serment le 12 septembre que Revolution Wind n'avait pas pleinement résolu une série de préoccupations. Il a notamment mentionné « l'incapacité continue du projet à parvenir à certains accords d'atténuation » avec l'armée et la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA). Suess a également signalé des problèmes de coordination avec les opérateurs militaires en mer et un « risque lié aux équipements de détection par fibre optique distribuée et de surveillance acoustique ».
Contexte historique
Depuis le début de l'éolien offshore, des tensions existent avec l'armée américaine concernant l'utilisation de la mer. En 2011, le Département de la Défense a créé un « centre d'échange » pour résoudre les problèmes potentiels liés au développement énergétique océanique, qu'il s'agisse de pétrole, de gaz ou d'éolien.
Les preuves d'Orsted
Orsted a répliqué en présentant des déclarations sous serment de hauts responsables de l'entreprise. Ces déclarations attestaient que, avant l'arrivée de l'administration Trump, l'armée et la NOAA avaient jugé le projet conforme. Melanie Gearon, responsable des permis pour le nord-est chez Orsted, a contredit les affirmations de Suess sur l'absence d'accord avec la division des pêches de la NOAA. Elle a détaillé des années de négociations avec la NOAA et le BOEM sur la gestion des études maritimes, négociations qui se sont poursuivies pendant des mois sous l'administration Trump.
Un courriel du BOEM à Orsted, daté du 9 juillet, indiquait explicitement que le personnel de l'agence discutait de scénarios où Orsted pourrait simplement « déclarer qu'ils continuent de travailler avec le National Marine Fisheries Service sur un accord d'atténuation des études, qui pourrait être soumis à une date ultérieure ».
Chiffres clés
- Plus de 5 000 projets sont examinés chaque année par le centre d'échange du DOD.
- Le coût estimé de l'annulation du projet pour Orsted était de plus de 1 milliard de dollars.
Edward LeBlanc, responsable des affaires maritimes chez Orsted et ancien militaire, a témoigné que la Marine n'avait jamais soulevé de problèmes concernant le câble d'exportation du projet. En juillet 2025, aucun fonctionnaire militaire n'avait exprimé de préoccupations persistantes concernant les émissions électromagnétiques, les collisions de navires ou d'autres problèmes potentiels de sécurité nationale.
La décision du juge et ses implications
Après la présentation de ces éléments, le juge de district américain Royce Lamberth a approuvé l'injonction préliminaire. Il a ainsi levé l'ordre d'arrêt, permettant la reprise des travaux. Cette décision a mis en évidence le fait que les allégations de sécurité nationale de l'administration Trump étaient faibles face aux preuves concrètes fournies par Orsted.
Josh Kaplowitz, avocat spécialisé dans l'environnement représentant des entreprises d'énergies renouvelables, a souligné que le processus d'examen des projets éoliens offshore est rigoureux. « Il n'y a pas une seule situation dont j'aie connaissance où le Département de la Défense ait demandé quelque chose et où l'agence d'approbation ait dit : 'Non, nous allons faire autre chose' », a-t-il déclaré.
Analyse indépendante
Une analyse du Government Accountability Office (GAO), un organisme de surveillance quasi-indépendant, a également examiné le processus fédéral d'autorisation de l'industrie éolienne offshore. Ce rapport, demandé par le représentant Chris Smith, un opposant majeur à l'éolien offshore, a révélé que la coordination entre l'armée et les agences d'autorisation se déroulait bien. Frank Russo, directeur du département des ressources naturelles du GAO, a confirmé : « Nous n'avons pas eu de recommandations à ce sujet. Il semblait que la coordination se passait bien, que le DOD était satisfait de ce qui se passait, et que s'il y avait des préoccupations, elles pouvaient être atténuées. »
Les responsables de la Défense sont impliqués dans la location de terrains pour l'éolien offshore depuis des années. Cela signifie que le personnel militaire de la Marine et des garde-côtes a déjà examiné les problèmes potentiels de sécurité et de préparation avant même que les entreprises ne sachent où elles étaient autorisées à construire.
L'avenir de la politique énergétique
Cette affaire soulève des questions sur la légitimité des arguments de sécurité nationale utilisés pour freiner le développement des énergies renouvelables. Le secrétaire à l'Intérieur, Doug Burgum, avait justifié l'ordre d'arrêt de Revolution Wind à la télévision nationale en affirmant que les interférences radar rendraient le pays vulnérable aux « attaques en essaim » de drones sous-marins. Cependant, les preuves présentées en cour par Orsted ont démontré une coordination solide et une absence de préoccupations militaires antérieures.
L'issue de cette affaire pourrait avoir un impact significatif sur les futures contestations des politiques anti-éoliennes. Elle pourrait encourager d'autres développeurs à s'opposer aux arrêts de projets basés sur des motifs jugés arbitraires ou non fondés. La clarté des procédures et la transparence des justifications deviennent essentielles pour le développement de l'énergie éolienne aux États-Unis.





