Les arbres de la forêt amazonienne voient leur tronc s'épaissir de 3,3 % chaque décennie. Cette croissance est directement liée à l'absorption accrue de dioxyde de carbone (CO2) présent dans l'atmosphère. Cette observation suggère une résilience plus importante des forêts face au réchauffement climatique qu'on ne le pensait auparavant.
Points clés
- Les arbres amazoniens s'épaississent de 3,3 % par décennie.
- Cette croissance est due à l'absorption de CO2 atmosphérique.
- Le phénomène concerne toutes les tailles d'arbres.
- La forêt montre une résilience inattendue face au changement climatique.
- Malgré cette adaptation, des menaces futures persistent.
L'Amazonie s'adapte au CO2
Une nouvelle étude révèle que les arbres de la forêt amazonienne, quelle que soit leur taille, s'épaississent en raison du changement climatique. L'augmentation des concentrations de CO2 dans l'atmosphère a créé un environnement plus riche en ressources pour ces plantes. Les chercheurs ont constaté une augmentation moyenne de 3,3 % de la circonférence des arbres à leur base chaque décennie depuis les années 1970.
« Nous savions que la quantité totale de carbone stockée dans les arbres des forêts amazoniennes intactes avait augmenté », a déclaré Tim Baker, co-auteur de l'étude et professeur d'écologie tropicale à l'Université de Leeds au Royaume-Uni. « Ce que cette nouvelle étude montre, c'est que des arbres de toutes tailles ont grossi au cours de la même période — toute la forêt a changé. »
Cette croissance est considérée comme une « bonne nouvelle ». Elle indique que les arbres amazoniens pourraient être plus résilients au réchauffement climatique que les précédentes estimations ne le suggéraient. C'est ce qu'a expliqué Beatriz Marimon, co-auteure de l'étude et professeure d'écologie des plantes tropicales à l'Université d'État du Mato Grosso au Brésil.
Fait intéressant
Le CO2 est un nutriment essentiel pour les plantes. Une concentration plus élevée peut stimuler la photosynthèse et la croissance, un phénomène connu sous le nom de 'fertilisation par le CO2'.
Méthodologie de l'étude
Pour cette recherche, les scientifiques ont collecté des données sur 188 parcelles réparties dans l'ensemble de la forêt amazonienne. Ils ont mesuré la surface terrière des arbres, c'est-à-dire l'espace occupé par leurs troncs au sol de la forêt. Le suivi a débuté en 1971 et s'est achevé en 2015. La durée d'observation a varié selon les parcelles, la plus longue période de suivi continu atteignant 30 ans.
L'équipe, composée de près de 100 scientifiques spécialistes des plantes tropicales, avait envisagé plusieurs scénarios possibles pour les résultats. L'un de ces scénarios, appelé « les gagnants prennent tout », décrivait une situation où seuls les grands arbres bénéficieraient de l'augmentation des niveaux de CO2. Les grands arbres ont un meilleur accès à la lumière et aux nutriments, ce qui les rend plus adaptables aux conditions changeantes.
Scénarios envisagés
- « Les gagnants prennent tout » : Seuls les grands arbres profitent du CO2.
- « Bénéfice limité en carbone » : Les petits arbres, initialement plus limités en ressources, bénéficient davantage de l'augmentation du CO2.
- « Bénéfices partagés » : Une combinaison des deux scénarios, où les bénéfices sont répartis entre les arbres de toutes tailles.
Contexte climatique
Des études antérieures indiquent que l'augmentation des températures et des niveaux de CO2 pousse la forêt amazonienne vers un point de basculement. Ce point pourrait transformer l'écosystème en savane d'ici 100 ans. Toutefois, à court terme, les arbres semblent tirer parti de ce climat pour stocker de grandes quantités de carbone et grossir.
Des bénéfices partagés pour le moment
Les résultats de l'étude, publiés dans la revue Nature Plants, suggèrent que le scénario des « bénéfices partagés » prévaut actuellement. « Les arbres des forêts intactes ont grossi », a précisé Beatriz Marimon. Elle a ajouté que même les plus grands arbres, souvent plus vulnérables aux événements climatiques comme la sécheresse et la foudre, prospèrent dans les zones non déforestées. Pour l'instant, les arbres amazoniens de toutes tailles semblent profiter des niveaux accrus de CO2.
« Les grands arbres sont extrêmement bénéfiques pour absorber le CO2 de l'atmosphère, et cette étude le confirme », a déclaré Adriane Esquivel Muelbert, co-auteure principale de l'étude et professeure associée d'écologie des plantes tropicales à l'Université de Cambridge. « Malgré les inquiétudes selon lesquelles le changement climatique pourrait impacter négativement les arbres de l'Amazonie et affaiblir l'effet de puits de carbone, l'effet du CO2 stimulant la croissance est toujours présent. Cela montre la remarquable résilience de ces forêts, du moins pour l'instant. »
Cependant, les chercheurs ont averti qu'avec le temps, l'augmentation de la surface terrière pourrait devenir plus prononcée chez les grands arbres. Ces derniers pourraient alors dominer l'écosystème au détriment des petits arbres.
Perspectives et menaces futures
Aucune des parcelles étudiées n'a montré de diminution de la surface terrière. Cela indique que les effets négatifs du climat ont été, jusqu'à présent, compensés par la disponibilité croissante de CO2. Cependant, cette situation pourrait changer rapidement. Les chercheurs prévoient un ralentissement de la croissance des arbres et une augmentation de la mortalité au cours des prochaines décennies.
Ce ralentissement et cette mortalité accrue pourraient résulter d'une combinaison de facteurs. Parmi eux, on trouve le stress thermique, le stress hydrique, les incendies de forêt et les tempêtes. Ces phénomènes augmentent déjà en fréquence et en gravité. Outre la réduction de nos émissions de carbone, la meilleure façon de protéger la forêt amazonienne contre ces facteurs est de la maintenir intacte, soulignent les chercheurs.
« Ces résultats soulignent l'importance des forêts tropicales dans nos efforts continus pour atténuer le changement climatique d'origine humaine », a conclu Adriane Esquivel Muelbert.
La survie de l'Amazonie est cruciale pour la régulation du climat mondial. La compréhension de sa capacité d'adaptation est une étape importante, mais elle ne doit pas masquer les défis à venir.





