Le réchauffement climatique pourrait bientôt transformer l'un des plus grands défis d'endurance humaine. Une nouvelle étude révèle que la hausse des températures mondiales rendra les conditions de course de plus en plus difficiles, menaçant la capacité des athlètes à battre des records et même à terminer les courses en toute sécurité.
Cette tendance affecte déjà les marathons les plus prestigieux du monde, de Boston à Tokyo, et soulève des questions cruciales sur l'avenir de ce sport emblématique.
Points Clés
- Une étude révèle que 86 % des 221 marathons analysés auront des conditions de course moins favorables d'ici 2045.
- La température idéale pour les marathoniens d'élite est de 4 °C pour les hommes et 9 °C pour les femmes, des conditions qui deviennent plus rares.
- Les risques pour la santé des coureurs, tels que l'épuisement par la chaleur et la déshydratation, sont en augmentation.
- Les organisateurs de courses envisagent des ajustements, comme des départs plus tôt, pour contrer les effets de la chaleur.
Une menace scientifique pour la performance
Une analyse récente menée par l'organisation Climate Central dresse un tableau inquiétant pour l'avenir de la course à pied de longue distance. En examinant 221 courses à travers le monde, les chercheurs ont conclu que 86 % d'entre elles seront moins susceptibles d'offrir des conditions optimales pour les coureurs d'ici 2045.
Cette projection inclut les sept marathons majeurs : New York, Londres, Berlin, Tokyo, Chicago, Boston et le nouveau venu, Sydney. La fenêtre de temps idéale pour des performances de pointe se rétrécit à mesure que la planète se réchauffe.
Qu'est-ce qu'une température optimale ?
Selon l'étude, la température idéale pour un marathonien d'élite est d'environ 4 degrés Celsius. Pour les femmes d'élite, cette température monte à 9 degrés Celsius. Des températures plus élevées augmentent considérablement le stress physiologique sur le corps.
Les données sont claires. Pour le marathon de Tokyo, la probabilité de bénéficier de températures idéales pour les hommes devrait passer de 69 % aujourd'hui à 57 % d'ici deux décennies. De même, les chances pour le marathon de Boston chuteront de 61 % à 53 %.
Les risques pour la santé des athlètes
Au-delà de la quête de records, c'est la santé des coureurs qui est en jeu. Courir 42,195 kilomètres dans des conditions de chaleur et d'humidité élevées met le corps à rude épreuve, augmentant les risques de déshydratation et d'épuisement par la chaleur.
Mhairi Maclennan, une coureuse de fond écossaise, a souligné les dangers.
« Nous avons vu à maintes reprises des athlètes s'évanouir à cause de la déshydratation et de l'épuisement par la chaleur pendant les courses, et mettre des mois à s'en remettre », a-t-elle expliqué.
Les impacts physiologiques sont sérieux. Une chaleur excessive peut affecter la viscosité du sang, ralentir la récupération et perturber les cycles d'entraînement futurs. Ces incidents peuvent retarder, voire compromettre, les objectifs de carrière d'un athlète.
Des exemples récents
Les effets de la chaleur ne sont pas une menace lointaine. Lors du marathon de Berlin en septembre dernier, le thermomètre a atteint 24 °C. À Tokyo et à Londres, les températures ont dépassé les 20 °C. Les organisateurs berlinois ont même conseillé aux participants de « détourner leur attention de la chasse aux records » pour se concentrer sur l'expérience, en insistant sur l'hydratation et les stratégies de refroidissement.
L'avenir des grandes courses mondiales
Face à cette nouvelle réalité climatique, les organisateurs de marathons sont confrontés à un véritable casse-tête logistique. Les courses sont traditionnellement programmées au printemps et à l'automne dans l'hémisphère nord pour profiter des températures fraîches.
Andrew Pershing, qui a dirigé l'équipe scientifique de Climate Central, explique le problème. « À mesure que le climat se réchauffe, si une course a lieu la même semaine chaque année, ce bon climat vous échappe. Ces bonnes conditions deviennent de moins en moins fréquentes », a-t-il déclaré.
Plusieurs solutions sont à l'étude pour s'adapter :
- Avancer les heures de départ : Lancer les courses aux premières lueurs du jour pourrait permettre d'éviter les pics de chaleur.
- Modifier le calendrier : Déplacer les dates des événements vers des périodes plus fraîches de l'année.
- Améliorer le soutien aux coureurs : Augmenter le nombre de points d'eau et de postes de secours.
Un exemple extrême a été observé lors des Championnats du monde d'athlétisme de 2019 à Doha, où les marathons masculin et féminin ont débuté à minuit. Malgré cela, la température pour la course féminine a atteint 31 °C avec une humidité de 77 %.
Un paradoxe pour les records du monde
Étonnamment, plusieurs records du monde de marathon ont été battus ces dernières années, tant chez les hommes que chez les femmes. Beaucoup attribuent ces performances exceptionnelles aux avancées technologiques des chaussures de course, qui améliorent l'efficacité énergétique.
Le regretté Kelvin Kiptum a établi le record masculin à 2:00:35 en 2023 à Chicago, tandis que Ruth Chepngetich a fixé la marque féminine à 2:09:56 dans la même ville. Cependant, les experts préviennent que cette tendance pourrait ne pas durer.
Même avec des chaussures plus performantes, la physiologie humaine a ses limites. La chaleur reste un obstacle fondamental que la technologie ne peut surmonter seule. Pour Maclennan, la conclusion est inévitable : « Je pense que les vagues de chaleur sont déjà en train de réécrire l'histoire des courses. »
L'avenir du marathon dépendra de la capacité du sport à s'adapter à un monde en mutation, en trouvant un équilibre entre la performance, la tradition et, surtout, la sécurité des milliers de coureurs qui se pressent chaque année sur les lignes de départ.





