Alors que la planète se réchauffe, un phénomène inquiétant se produit sous nos pieds : les microbes dormants depuis des milliers d'années dans le pergélisol de l'Arctique se réveillent. Cette activité pourrait libérer d'énormes quantités de gaz à effet de serre, créant un cycle de réchauffement difficile à stopper.
Points clés
- Le pergélisol contient environ 1 500 gigatonnes de carbone organique.
- Des microbes anciens, datant de 40 000 ans, se réactivent avec le dégel.
- L'activité microbienne augmente significativement avec des étés prolongés.
- La libération de ces gaz pourrait accélérer le réchauffement climatique.
Le réveil des dormeurs souterrains
Le pergélisol, ces sols gelés en permanence dans les régions arctiques, abrite une quantité considérable de matière organique. Feuilles, racines et même animaux morts y sont piégés depuis des millénaires. Avec le réchauffement climatique, ces sols commencent à dégeler, permettant aux microbes emprisonnés de reprendre vie.
Leur réveil est préoccupant. En décomposant cette matière organique, ils libèrent du dioxyde de carbone et du méthane. Ces gaz augmentent la température de la Terre, ce qui fait fondre davantage de pergélisol. C'est un cercle vicieux.
Un fait inquiétant
Le pergélisol renferme environ 1 500 gigatonnes de carbone organique. C'est presque le double de la quantité actuellement présente dans l'atmosphère terrestre.
Une expérience en laboratoire simule le dégel
Des chercheurs de l'Université du Colorado à Boulder ont recréé le processus de dégel en laboratoire. Ils ont étudié des échantillons de sol gelé vieux de 40 000 ans. En ajoutant de l'eau et en augmentant légèrement la température, ils ont observé ce qui se passait.
Les microbes n'ont pas tardé à se réactiver. Les résultats, publiés dans JGR Biogeosciences, montrent que leur retour à la vie est plus rapide que prévu. Cette étude permet de mieux comprendre les conséquences du dégel du pergélisol.
« Après six mois, certaines colonies bactériennes ont même produit des structures visqueuses appelées 'biofilms' visibles à l'œil nu. »
L'importance de la durée du dégel
Au début de l'expérience, l'activité microbienne était faible lorsque les échantillons étaient incubés entre 3 et 12 °C. Cela suggérait qu'une courte période de chaleur ne provoquerait pas une augmentation massive des émissions.
Cependant, après six mois, la situation a changé. Les microbes sont devenus beaucoup plus actifs. Cette activité prolongée est suffisante pour libérer des quantités substantielles de gaz dans l'atmosphère, surtout si les étés arctiques deviennent plus longs.
Contexte de l'étude
Les échantillons de pergélisol ont été prélevés dans le tunnel de pergélisol de l'U.S. Army Corps of Engineers en Alaska. Ce site de recherche de 110 mètres de long est creusé dans un sol gelé ancien, offrant un environnement idéal pour simuler les conditions futures de l'Arctique.
Les étés prolongés, une menace majeure
L'étude a mis en évidence que ce n'est pas l'intensité de la chaleur qui pose le plus grand risque, mais sa durée. Des pics de chaleur de courte durée ont eu peu d'impact sur l'activité microbienne.
En revanche, une exposition prolongée aux conditions estivales, comme celles que prévoient les modèles climatiques, a donné aux microbes le temps de se réveiller et de commencer leur travail de décomposition. Les émissions de gaz à effet de serre ont alors augmenté de manière significative.
- Les modèles climatiques prévoient des étés arctiques plus longs.
- Des étés plus longs favorisent l'activation microbienne.
- L'activité accrue des microbes libère plus de CO2 et de méthane.
Un point de basculement climatique ?
Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) estime que le pergélisol dégelé pourrait ajouter jusqu'à 100 parties par million (ppm) de CO2 à l'atmosphère d'ici 2100. C'est une quantité importante, mais elle reste inférieure aux plus de 420 ppm déjà présents.
Néanmoins, cette recherche souligne une variable cruciale : plus l'été arctique dure, plus les microbes anciens deviennent actifs. Cela pourrait nous rapprocher des boucles de rétroaction dont les climatologues avertissent depuis longtemps.
En somme, le réchauffement de l'Arctique et ce qu'il révèle sous la surface pourrait devenir l'une des plus grandes menaces pour notre atmosphère. Comprendre ces mécanismes est essentiel pour anticiper et, si possible, atténuer les impacts futurs.





