Amsterdam, la capitale néerlandaise, célèbre ses 750 ans cette année. Depuis sa fondation au XIIIe siècle, la ville a constamment lutté contre la menace omniprésente de l'eau, se situant environ deux mètres sous le niveau de la mer. Cette histoire de résilience et d'adaptation face aux défis environnementaux offre des leçons cruciales pour d'autres villes confrontées au changement climatique.
Points Clés
- Amsterdam, fondée au XIIIe siècle, célèbre 750 ans d'adaptation à l'eau.
- La ville se situe deux mètres sous le niveau de la mer.
- Les techniques de gestion de l'eau ont façonné son développement et son commerce.
- De nouvelles îles artificielles comme Strandeiland sont construites pour l'expansion urbaine.
- La ville intègre désormais des jardins de pluie et des réservoirs obligatoires pour gérer les précipitations extrêmes.
Une Histoire de Lutte Contre les Éléments
L'existence même d'Amsterdam est le fruit d'une adaptation continue à son environnement. La région a été profondément modifiée par de puissantes tempêtes et des montées du niveau de la mer durant la Période Chaude Médiévale. En 1287, la ville est devenue une propriété côtière suite à la catastrophique inondation de Sainte-Lucie.
Le nom d'Amsterdam, signifiant « le barrage sur l'Amstel », témoigne de l'infrastructure essentielle construite pour gérer sa position basse et précaire. Le sol marécageux, composé d'argile et de tourbe, a rendu la construction de bâtiments lourds extrêmement difficile, nécessitant des techniques innovantes dès le début de son développement.
Fait Intéressant
Jusqu'en 1925, tous les bâtiments d'Amsterdam reposaient sur des pieux en bois enfoncés de 12 à 15 mètres dans le sol, atteignant une couche stable de sable et de gravats. Ces pieux provenaient souvent de Scandinavie ou d'Allemagne, transportés par radeau ou par bateau.
L'Ingéniosité au Service de l'Urbanisme
La gestion de l'eau est au cœur de la planification urbaine d'Amsterdam. Ton Schaap, urbaniste du projet des îles artificielles, le souligne : « La gestion de l'eau est la base de la planification d'Amsterdam. Quand ils planifient une partie de la ville, il y a toujours non seulement les routes, mais aussi les canaux et les ponts. Sans cela, vous n'avez pas les pieds au sec. »
Les pieux en bois devaient rester immergés pour éviter la pourriture. Des niveaux d'eau bas pouvaient exposer le bois à l'oxygène, entraînant l'affaissement des fondations, encore visible aujourd'hui dans certains bâtiments inclinés le long des canaux. Les écluses sur l'Amstel étaient donc cruciales, non seulement pour prévenir les inondations, mais aussi pour maintenir les niveaux d'eau.
Contexte Historique
Le commerce du bois, nécessaire à la construction, a renforcé la position commerciale d'Amsterdam, en faisant un carrefour majeur pour le bois et les céréales de la Baltique vers l'Europe atlantique et la vallée du Rhin. Cette nécessité environnementale a ainsi stimulé le développement économique.
La Société Face aux Défis de l'Eau
La débrouillardise n'a jamais été une option pour les habitants de cette région. Avant la construction des digues et des canaux au Moyen Âge, les communautés vivaient sur des tertres artificiels appelés terpen. La coopération était essentielle pour construire les infrastructures de protection nécessaires à leur survie.
Les inondations étaient redoutées, surnommées le « Loup d'Eau », car elles pouvaient noyer les habitants et détruire les champs. Les négligences dans l'entretien des digues, comme lors des guerres des Hameçons et des Cabillauds, ont entraîné la mort de milliers de personnes et transformé des terres fertiles en zones salées.
« L'organisation et le commerce extérieur nécessaires au développement d'Amsterdam ont apporté plus que de simples solutions aux défis environnementaux. Ils ont contribué à forger une société ingénieuse et mobile, à l'avant-garde de la modernité. »
Un Système de Gestion de l'Eau Complexe
Dès 1248, les Pays-Bas ont créé leur premier conseil des eaux (Waterschap), un organisme régional chargé de la protection contre les inondations et du drainage. Amsterdam, de son côté, a développé un système de canaux très complexe. Petra Van Dam, professeure d'histoire à l'Université Libre d'Amsterdam, décrit la ville comme un « paysage de montagne miniature » en raison des différents niveaux des rues et des canaux.
En 1675, la ville a créé le Stadwaterkantoor (bureau de l'eau de la ville) pour surveiller les niveaux d'eau des canaux. Cela a conduit à l'établissement d'un niveau zéro convenu, le Niveau Normal d'Amsterdam, qui a été adopté à travers le pays et une grande partie de l'Europe occidentale au XIXe siècle.
L'Adaptation Continue : Des Îles Artificielles aux Jardins de Pluie
Les défis historiques ne sont pas tous les mêmes aujourd'hui. En 1932, Amsterdam a renoncé à sa position côtière privilégiée en construisant une chaussée de 32 kilomètres, l'Afsluitdijk, qui a fermé la Zuiderzee et transformé la baie en deux lacs plus calmes, l'IJsselmeer et le Markermeer.
L'esprit d'adaptation reste profondément ancré dans l'ADN de la ville. Le développement de nouvelles îles comme Strandeiland dans l'IJburg en est un exemple moderne. Ces îles sont construites en pompant du sable du fond marin et en ajoutant de fines couches, un processus qui peut prendre plusieurs années. Cette technique est surnommée la « méthode des crêpes ».
La Méthode des Crêpes
La « méthode des crêpes » consiste à pomper une fine couche de sable dans un moule en forme d'île, puis à la laisser sécher avant d'ajouter une nouvelle couche, comme on ferait des crêpes.
Face aux Pluies Extrêmes
Avec l'augmentation des averses intenses, Amsterdam ne cherche plus seulement à évacuer l'eau, mais aussi à en absorber davantage. La planification actuelle vise à résister à des événements de pluie extrêmes de 70 millimètres en une heure, un volume bien supérieur à ce que la ville a connu par le passé.
Les rues sont désormais équipées de jardins de pluie, des zones non pavées et absorbantes plantées de végétation tolérante aux inondations. Ces jardins, appelés WADIs, cachent des tuyaux qui recueillent l'eau de ruissellement, permettant à une partie de l'eau de s'infiltrer dans le sol avant d'atteindre une citerne souterraine.
Les trottoirs en béton sont remplacés par des pavés perméables à l'eau, transformant les zones urbaines en éponges plus efficaces contre les inondations. De plus, les nouveaux bâtiments doivent obligatoirement inclure un réservoir de ruissellement, souvent sous forme de bassin ou de plan d'eau, qui stocke temporairement l'excès de pluie.
Des Efforts Continuels, Mais une Vulnérabilité Persistante
Malgré ces efforts importants, la ville reste vulnérable. Melanie van der Horst, adjointe au maire d'Amsterdam chargée de la gestion environnementale, exprime une certaine prudence : « Il semble que nous fassions beaucoup, mais je sais que nous n'en faisons pas encore assez. Nous ne sommes pas prêts pour ces fortes pluies ou pour les inondations. »
L'expérience passée d'Amsterdam a forgé une approche pragmatique et expérimentale. Cependant, la ville est novice face à de nouvelles menaces comme les périodes prolongées de chaleur extrême. Néanmoins, cette culture environnementale, ancrée dans la familiarité avec l'eau et l'esprit d'entreprise, continue de guider son adaptation.
« La chose la plus importante est cette attitude entrepreneuriale que les gens ont. Je pense que lorsque vous êtes engagé dans la navigation et si familier avec l'eau, c'est une culture environnementale. » – Petra Van Dam





