La Première ministre de Trinité-et-Tobago, Kamla Persad-Bissessar, a vivement critiqué l'approche des pays développés sur la question climatique lors de son discours à la 80e Assemblée générale des Nations Unies. S'exprimant à New York le 26 septembre, elle a mis en garde contre ce qu'elle qualifie d'« instrumentalisation » de l'agenda climatique pour faire pression sur les nations en développement.
Selon Mme Persad-Bissessar, cette stratégie coercitive compromet les efforts de développement et ignore les responsabilités historiques des nations industrialisées. Elle a plaidé pour une approche équilibrée qui permette aux pays de concilier leurs objectifs de croissance économique avec la protection de l'environnement.
Points Clés
- Kamla Persad-Bissessar a dénoncé une approche "antagoniste" et coercitive de la part des défenseurs du climat et des pays développés.
- Elle accuse les nations riches d'utiliser l'accès au financement et à la technologie comme un moyen de pression pour imposer leur agenda climatique.
- La Première ministre a souligné que les pays développés ont atteint leur prospérité grâce à des industries polluantes.
- Elle a réaffirmé que les combustibles fossiles restent essentiels à la survie économique de nombreuses nations en développement.
- Trinité-et-Tobago refuse d'adopter des politiques climatiques qui nuiraient à son économie et à sa population.
Une critique des tactiques de pression
Au cœur de l'intervention de Kamla Persad-Bissessar se trouve une accusation directe envers les pays développés et certains activistes climatiques. Elle a affirmé que leur approche conflictuelle cause plus de tort que de bien. Selon elle, les nations en développement subissent des pressions pour adopter des politiques climatiques strictes sans un soutien adéquat.
"L'approche antagoniste adoptée par les activistes climatiques pour la mise en œuvre de leur agenda fait plus de mal que de bien", a déclaré Mme Persad-Bissessar devant l'Assemblée générale.
Elle a détaillé les mécanismes de cette pression, expliquant que l'accès aux systèmes financiers, aux technologies modernes et aux financements pour le développement est conditionné à l'adhésion aux objectifs climatiques fixés par d'autres. "C'est exactement ce qui se passe lorsque l'accès aux systèmes financiers, aux plateformes médiatiques, aux nouvelles technologies et aux financements pour le développement est instrumentalisé pour forcer la conformité aux objectifs climatiques", a-t-elle précisé.
Le "chantage" climatique dénoncé
La Première ministre a utilisé des termes forts, qualifiant cette stratégie de "chantage". Elle a insisté sur le fait que les pays développés ne peuvent pas imposer un agenda climatique unilatéral aux nations souveraines en développement. Cette méthode, selon elle, ignore les réalités économiques et sociales spécifiques à chaque pays.
Contexte : Les petits États insulaires en développement (PEID)
Trinité-et-Tobago fait partie des Petits États Insulaires en Développement (PEID). Ces nations sont particulièrement vulnérables aux effets du changement climatique, comme la montée du niveau de la mer. Cependant, leurs économies sont souvent dépendantes de ressources naturelles, y compris les hydrocarbures, ce qui crée un dilemme complexe entre la survie économique et l'action climatique.
La responsabilité historique en question
Un autre argument central du discours de Mme Persad-Bissessar est celui de la justice climatique et de la responsabilité historique. Elle a rappelé que les nations aujourd'hui les plus riches ont bâti leur prospérité sur des décennies d'industrialisation fortement polluante, sans contraintes environnementales.
"Ce qui ajoute l'insulte à cette injustice, c'est que beaucoup de ces mêmes nations développées qui soutiennent activement l'imposition d'un agenda climatique agressif ont en fait atteint leur statut de nation développée et leur prospérité grâce à des industries hautement destructrices pour l'environnement et polluantes au cours des décennies passées", a-t-elle souligné.
Cette perspective met en lumière une inégalité fondamentale dans le débat climatique mondial. Les pays en développement sont invités à freiner leur croissance pour résoudre un problème qu'ils n'ont, historiquement, que très peu contribué à créer. Cette situation est souvent perçue comme une tentative de maintenir les déséquilibres économiques mondiaux sous couvert de politique environnementale.
Dépendance aux combustibles fossiles
L'économie de Trinité-et-Tobago repose largement sur son secteur énergétique, notamment le pétrole et le gaz naturel. Selon les données de la Banque mondiale, les exportations de combustibles représentent une part significative de son PIB, rendant une transition énergétique rapide particulièrement difficile sans un soutien international massif et une diversification économique préalable.
Équilibre entre développement et environnement
Tout en reconnaissant la place des énergies renouvelables dans le futur énergétique, la Première ministre a insisté sur le rôle indispensable des combustibles fossiles pour le présent. "Le fait est que les combustibles fossiles sont essentiels à notre survie continue", a-t-elle affirmé, mettant en avant les besoins immédiats de son pays.
Elle a plaidé pour le droit de chaque nation à définir sa propre politique climatique. Cette politique doit, selon elle, trouver un équilibre pragmatique entre trois piliers :
- Les objectifs de développement économique.
- Les politiques d'éradication de la pauvreté.
- La protection de l'environnement.
"Cet équilibre est une nécessité pragmatique pour la sécurité alimentaire, l'ordre civil et la croissance économique", a-t-elle ajouté. Pour Trinité-et-Tobago, imposer des politiques climatiques trop strictes sans tenir compte de ce contexte reviendrait à sacrifier le bien-être de sa population.
La position ferme de Trinité-et-Tobago
En conclusion de son intervention, Kamla Persad-Bissessar a clairement défini la position de son gouvernement. Trinité-et-Tobago s'engage à soutenir des actions raisonnables pour protéger l'environnement pour les générations futures. Cependant, le pays n'adoptera pas de politiques climatiques qu'il juge "déséquilibrées, déraisonnables et imposées".
Elle a averti que de telles politiques pourraient entraîner des conséquences sociales et économiques désastreuses. Parmi les risques cités figurent l'exportation d'emplois, la baisse du niveau de vie, le freinage du développement économique et une augmentation de la pauvreté.
La Première ministre a également critiqué l'hypocrisie de certains grands pays qui, selon elle, "ignorent complètement leurs responsabilités" tout en faisant pression sur les plus petites nations. Cette déclaration résonne comme un appel à une répartition plus juste des efforts dans la lutte mondiale contre le changement climatique, une lutte qui doit être menée de manière équitable et sans compromettre l'avenir des pays en développement.





