Des scientifiques, grâce aux données du satellite CryoSat de l'Agence Spatiale Européenne (ESA), ont identifié 85 nouveaux lacs sous-glaciaires en Antarctique. Cette découverte majeure, publiée dans Nature Communications le 19 septembre 2025, révèle l'étendue et la complexité des réseaux hydriques cachés sous la calotte glaciaire. Ces réservoirs d'eau influencent directement le mouvement des glaciers et, par conséquent, le niveau mondial des mers. L'étude s'appuie sur une décennie d'observations continues, de 2010 à 2020.
Points Clés
- 85 nouveaux lacs sous-glaciaires actifs découverts en Antarctique.
- Le nombre total de lacs actifs connus passe à 231, soit une augmentation de plus de 50 %.
- Les données proviennent de dix ans d'observations du satellite CryoSat de l'ESA.
- Ces lacs influencent le mouvement des glaciers et les prévisions d'élévation du niveau de la mer.
- De nouvelles routes de drainage souterraines et cinq systèmes de lacs interconnectés ont été identifiés.
Un aperçu inédit de la dynamique de la glace antarctique
Ces lacs, situés plusieurs kilomètres sous la surface gelée près du pôle Sud, jouent un rôle essentiel dans la formation du paysage glacé du continent. Leur nature active, caractérisée par des cycles de remplissage et de vidange, offre une fenêtre rare sur les processus qui se déroulent à la base de la calotte glaciaire. La découverte porte le nombre total de lacs sous-glaciaires actifs documentés en Antarctique à 231, une augmentation de plus de la moitié.
Les chercheurs ont également mis en évidence de nouvelles routes de drainage souterraines. Parmi celles-ci, cinq systèmes de lacs interconnectés ont été identifiés, soulignant la complexité du réseau hydrologique caché. Ces informations sont cruciales pour comprendre comment l'eau se déplace sous la glace.
Fait Intéressant
Avant cette étude, seulement 36 cycles complets de remplissage et de vidange de lacs sous-glaciaires avaient été observés dans le monde. Cette recherche en a ajouté 12, portant le total à 48. Cela montre à quel point ces événements sont difficiles à détecter et à suivre.
Le rôle crucial du satellite CryoSat
La mission CryoSat de l'ESA, lancée en 2010, est spécifiquement conçue pour surveiller avec précision les changements d'épaisseur de la glace marine et des vastes calottes glaciaires du Groenland et de l'Antarctique. Son instrument principal, un altimètre radar, est capable de détecter de minuscules variations de la hauteur de la surface de la glace.
En analysant une décennie de données de CryoSat (2010-2020), les scientifiques ont pu observer des changements localisés dans la hauteur de la surface de l'Antarctique. Ces variations sont directement liées aux cycles de remplissage et de vidange des lacs sous-glaciaires. Quand un lac se remplit, la surface de la glace au-dessus s'élève. Quand il se vide, la surface s'affaisse. C'est ainsi que les chercheurs ont pu cartographier ces lacs et suivre leur évolution.
« Il est incroyablement difficile d'observer les événements de remplissage et de vidange des lacs sous-glaciaires dans ces conditions, d'autant plus qu'ils prennent plusieurs mois ou années pour se produire. »
Anna Hogg, co-auteure de l'étude et professeure à l'Université de Leeds, a souligné la nature dynamique de ces phénomènes : « Il a été fascinant de découvrir que les zones des lacs sous-glaciaires peuvent changer au cours de différents cycles de remplissage ou de vidange. Cela montre que l'hydrologie sous-glaciaire antarctique est beaucoup plus dynamique que ce que l'on pensait, nous devons donc continuer à surveiller ces lacs à mesure qu'ils évoluent à l'avenir. »
Implications pour les prévisions du niveau de la mer
Les observations de ces lacs sont essentielles pour comprendre la dynamique structurelle des calottes glaciaires et leur interaction avec l'océan environnant. Les modèles numériques actuels utilisés pour projeter la contribution des calottes glaciaires entières à l'élévation du niveau de la mer ne prennent pas encore en compte l'hydrologie sous-glaciaire.
Selon Sally Wilson, « Ces nouveaux ensembles de données sur l'emplacement des lacs sous-glaciaires, leur étendue et les séries chronologiques des changements, seront utilisés pour développer notre compréhension des processus qui régissent l'écoulement de l'eau sous l'Antarctique. »
Contexte : Comment se forme un lac sous-glaciaire ?
L'eau de fonte sous-glaciaire se forme en raison de la chaleur géothermique provenant du substrat rocheux de la Terre et de la chaleur de frottement lorsque la glace glisse sur ce substrat. Cette eau de fonte peut s'accumuler à la surface du substrat rocheux et se drainer périodiquement. Cet écoulement d'eau a le potentiel de réduire le frottement entre la glace et le substrat rocheux sur lequel elle repose, permettant à la glace de glisser plus rapidement vers l'océan.
Martin Wearing, coordinateur du cluster scientifique polaire de l'ESA, a ajouté : « Cette recherche démontre à nouveau l'importance des données de la mission CryoSat pour améliorer notre compréhension des régions polaires et en particulier de la dynamique des calottes glaciaires. Plus nous comprendrons les processus complexes affectant la calotte glaciaire antarctique, y compris l'écoulement de l'eau de fonte à la base de la calotte glaciaire, plus nous pourrons projeter avec précision l'étendue de l'élévation future du niveau de la mer. »
L'importance des cycles de remplissage et de vidange
Les cycles de remplissage et de vidange des lacs sous-glaciaires représentent un ensemble de données important pour les modèles de calottes glaciaires et climatiques. En surveillant ces phénomènes, les scientifiques peuvent améliorer leur compréhension des interactions entre la calotte glaciaire, le substrat rocheux, l'océan et l'atmosphère. Cette compréhension est essentielle pour prévoir la stabilité future des calottes glaciaires.
« L'hydrologie sous-glaciaire est une pièce manquante dans de nombreux modèles de calottes glaciaires », a déclaré Sally Wilson. « En cartographiant où et quand ces lacs sont actifs, nous pouvons commencer à quantifier leur impact sur la dynamique de la glace et améliorer les projections de l'élévation future du niveau de la mer. »
Le Lac Vostok : Un géant stable
Le plus grand lac sous-glaciaire connu est le lac Vostok, sous la calotte glaciaire de l'Antarctique oriental. Il contiendrait entre 5 000 et 65 000 kilomètres cubes d'eau, enfouis sous 4 kilomètres de glace. Bien qu'il soit considéré comme stable, un éventuel drainage aurait des conséquences majeures sur la stabilité de la calotte glaciaire antarctique, la circulation océanique, les habitats marins et le niveau mondial des mers.
Cette recherche met en lumière la nature complexe et interconnectée du système climatique terrestre. Les découvertes faites sous la glace de l'Antarctique ont des répercussions significatives sur la compréhension des changements climatiques mondiaux et la précision des prévisions futures.





