Les niveaux de méthane atmosphérique continuent d'augmenter à un rythme record, malgré les engagements de 159 pays à réduire ces émissions de 30 % d'ici 2030. Cette hausse, plus rapide au cours des cinq dernières années que jamais auparavant, menace de pousser la planète vers un état de serre irréversible, avec des températures potentiellement 4 à 5 °C plus élevées qu'à l'ère préindustrielle. Contrairement au dioxyde de carbone, le méthane se décompose rapidement dans l'atmosphère, offrant une opportunité unique de ralentir le réchauffement climatique.
Points clés
- Les concentrations de méthane augmentent plus vite que jamais.
- La réduction du méthane pourrait ralentir le réchauffement de 0,4 °C d'ici 2050.
- Les entreprises pétrolières et gazières sont les principaux émetteurs, malgré des solutions peu coûteuses.
- L'Union Européenne a mis en place des règles strictes sur le méthane.
- Une action globale coordonnée est nécessaire pour atteindre les objectifs de réduction.
La menace du méthane et son impact rapide
Le méthane est un gaz à effet de serre puissant. Il piège la chaleur dans l'atmosphère de manière bien plus efficace que le dioxyde de carbone sur une courte période. Bien qu'il reste dans l'atmosphère pendant environ une décennie, sa capacité de réchauffement immédiat est considérable. La rapidité de sa décomposition représente une fenêtre d'opportunité cruciale pour la lutte contre le changement climatique.
Selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), la réduction des émissions de méthane est l'une des actions les plus rapides et efficaces pour ralentir le réchauffement planétaire. Une diminution significative pourrait potentiellement réduire le réchauffement global de 0,4 °C d'ici 2050. Cela offrirait un répit essentiel pour s'attaquer aux émissions de dioxyde de carbone, qui persistent bien plus longtemps.
Le méthane en chiffres
- Durée de vie atmosphérique : environ 10 ans.
- Potentiel de réchauffement : 28 à 34 fois supérieur à celui du CO2 sur 100 ans.
- Augmentation récente : les concentrations ont grimpé plus vite ces 5 dernières années que jamais.
- Objectif mondial : réduire les émissions de 30 % d'ici 2030 (Engagement mondial sur le méthane de 2021).
Les principaux émetteurs et le manque d'action
Les entreprises du secteur des hydrocarbures (pétrole, gaz et charbon) sont identifiées comme des contributeurs majeurs aux émissions de méthane. Elles continuent de rejeter et de brûler du méthane, souvent à travers des fuites dans les infrastructures. Pourtant, le colmatage de ces fuites est l'une des mesures les moins coûteuses et les plus simples à mettre en œuvre pour réduire les émissions. Malgré la disponibilité de technologies de détection et de réparation, l'action reste insuffisante.
L'industrie de l'élevage, notamment la viande et les produits laitiers, est également une source importante de méthane. Les opérations d'élevage à l'échelle industrielle génèrent des quantités massives de ce gaz. Les critiques estiment que ce secteur adopte des tactiques similaires à celles de l'industrie du tabac, cherchant à nier, retarder et détourner l'attention des problèmes. Ce manque d'action concertée de la part des principaux émetteurs compromet les objectifs climatiques mondiaux.
"La réduction du méthane est le frein d'urgence du climat, capable de ralentir le train emballé du réchauffement suffisamment longtemps pour que nous puissions maîtriser les autres émissions de gaz à effet de serre." – Daphne Wysham, PDG de Methane Action.
Les efforts réglementaires et les défis internationaux
L'Union Européenne a pris les devants en matière de réglementation du méthane. De nouvelles règles importantes pourraient réduire les émissions de méthane provenant du pétrole et du gaz à l'échelle mondiale d'environ 30 %. Ces réglementations, qui entreront en vigueur en 2027, imposent une détection et un signalement stricts des fuites, ainsi que de nouvelles normes d'intensité de méthane pour les carburants importés.
Cependant, ces mesures se heurtent à des pressions extérieures. L'administration Trump, par exemple, a exercé des pressions pour assouplir les normes européennes. L'objectif est de faciliter l'exportation de gaz naturel liquéfié (GNL) américain vers l'Europe, un carburant dont la production est jugée très intensive en méthane. L'industrie considère les réglementations européennes comme des "obstacles non tarifaires" au commerce, cherchant à privilégier les intérêts économiques à court terme.
Contexte de l'Engagement Mondial sur le Méthane
L'Engagement Mondial sur le Méthane (Global Methane Pledge), lancé en 2021, a réuni 159 pays s'engageant à réduire collectivement les émissions mondiales de méthane d'au moins 30 % par rapport aux niveaux de 2020 d'ici 2030. Cet engagement vise à limiter le réchauffement à court terme et à soutenir l'objectif de maintenir l'augmentation de la température mondiale en dessous de 1,5 °C. À mi-parcours de l'échéance, les émissions continuent d'augmenter, soulignant l'urgence d'une mise en œuvre plus stricte.
Des solutions locales et des alternatives énergétiques
Face à ces défis, des solutions existent. L'Ukraine, par exemple, pourrait jouer un rôle clé dans la sécurité énergétique européenne. Son vaste potentiel en énergie éolienne pourrait théoriquement alimenter l'Europe trois fois. Des groupes comme Elected Officials to Protect America (Élus pour Protéger l'Amérique) appellent à un "Plan Marshall" pour aider l'Ukraine à devenir un bouclier d'énergie propre pour le continent.
Aux États-Unis, les gouvernements des États et locaux peuvent également agir. La Californie a déjà mis en place des règles pionnières en matière de méthane. S'appuyant sur ces initiatives, la Subnational Methane Action Coalition (SMAC) rassemble des États, des provinces et des gouvernements locaux du monde entier. Leur objectif est de réduire les émissions de méthane sous leur propre responsabilité. La Californie, le Colorado et le Maryland font déjà partie de cette coalition, démontrant qu'une action locale peut compléter les efforts mondiaux.
Technologie et politiques pour une action immédiate
- Détection des fuites : Des technologies avancées permettent de localiser et de réparer efficacement les fuites de méthane dans les infrastructures gazières.
- Réglementations strictes : Des cadres législatifs contraignants sont nécessaires pour tenir les émetteurs responsables.
- Incitatifs économiques : Des mécanismes financiers peuvent encourager les entreprises à investir dans des technologies de réduction des émissions.
- Coopération internationale : Une approche coordonnée est essentielle pour harmoniser les normes et les pratiques à l'échelle mondiale.
Le temps est compté. Les solutions technologiques pour détecter et réparer les fuites sont disponibles. Les politiques pour responsabiliser les émetteurs de méthane sont sur la table. Une action rapide et décisive est nécessaire pour éviter les boucles de rétroaction climatique et créer la fenêtre de temps nécessaire à la décarbonation complète de l'économie mondiale. L'histoire du climat peut encore avoir une fin positive, à condition d'agir maintenant.





