Après des décennies d'efforts de conservation, la tortue marine verte (Chelonia mydas) voit son statut d'espèce menacée réévalué. L'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) a récemment annoncé que la population mondiale de ces reptiles marins a augmenté de près de 30% depuis les années 1970. Cette amélioration est le fruit de mesures internationales concertées, bien que des défis persistent pour certaines sous-populations.
Points Clés
- La population mondiale de tortues vertes a augmenté de près de 30% depuis les années 1970.
- L'UICN a reclassé la tortue verte comme espèce de « préoccupation mineure » globalement.
- Les interdictions de commerce, les lois nationales et les dispositifs anti-exclusion ont contribué à ce succès.
- Certaines sous-populations, notamment dans le Pacifique Central Sud, continuent de décliner.
- Le changement climatique et le développement côtier restent des menaces majeures pour l'espèce.
Un succès de conservation après des années de lutte
Pendant plus de 40 ans, les tortues vertes ont été au bord de l'extinction. La chasse commerciale pour leur viande, la collecte de leurs œufs et la destruction de leurs plages de nidification ont décimé leurs effectifs. L'UICN les avait classées comme « en danger » dans les années 1980, signalant un risque très élevé d'extinction.
Les efforts de conservation mondiaux ont inversé cette tendance. Des interdictions internationales sur le commerce des tortues marines ont été mises en place. De nombreuses lois nationales interdisent désormais la pêche et la récolte des œufs. Ces actions ont permis un rebond significatif.
Un Chiffre Clé
L'augmentation de près de 30% de la population mondiale de tortues vertes depuis les années 1970 est une preuve concrète de l'efficacité des efforts de conservation.
« L'augmentation globale reflète le travail de conservation efficace et constant de milliers de personnes pendant des décennies, dans des centaines de lieux à travers le monde », a déclaré Bryan Wallace, écologiste et coordinateur du groupe de spécialistes des tortues marines de l'UICN.
Des mesures variées pour la protection
La récupération de la tortue verte est le résultat d'une combinaison de stratégies. Des initiatives communautaires protègent les plages de nidification contre les braconniers et la montée des eaux. Des dispositifs d'exclusion des tortues (TED) ont été développés pour les filets de pêche. Ces grilles métalliques permettent aux grandes créatures marines de s'échapper des chaluts, évitant ainsi la noyade.
Roderic Mast, biologiste marin et co-président du groupe de spécialistes des tortues marines de l'UICN, a souligné l'importance des TED. Avant cette invention, les tortues se retrouvaient piégées et mouraient noyées. Pêcher sans ces dispositifs reste une menace grave pour l'espèce.
Une reprise inégale et des menaces persistantes
Malgré le succès global, la récupération n'est pas uniforme. Certaines sous-populations ne se rétablissent pas au même rythme. Dans l'Atlantique Sud, par exemple, la population a considérablement augmenté, avec environ 77 000 tortues matures. Elles ne sont plus considérées comme en danger dans cette région.
Cependant, la situation est différente dans le Pacifique Central Sud. Cette sous-population est en déclin, avec moins de 6 000 tortues matures dans des régions comme les Samoa américaines, les îles Cook et Fidji. Le manque de protections transfrontalières dans un pays peut affecter les sites de nidification d'un autre.
Contexte de l'UICN
La Liste Rouge des espèces menacées de l'UICN suit le risque d'extinction de plus de 170 000 espèces. Chaque espèce est classée selon neuf catégories, de « préoccupation mineure » à « éteinte », en fonction des tendances de sa population et des menaces.
Les défis du changement climatique
Même dans des pays comme l'Australie, qui abrite l'une des plus grandes populations de tortues vertes, l'espèce est classée comme vulnérable par l'UICN. La principale raison est le changement climatique. L'île de Raine, au large de la Grande Barrière de Corail, est le plus grand site de nidification au monde.
Bryan Wallace a expliqué que jusqu'à 150 000 nids y étaient pondus chaque année. Cependant, au cours de la dernière décennie, le taux d'éclosion a chuté drastiquement. La montée du niveau de la mer, l'intrusion d'eau salée, l'augmentation des températures du sable et l'érosion sont en cause. Cela représente une « bombe à retardement démographique » pour l'espèce.
En Floride, des événements météorologiques de plus en plus intenses menacent l'une des zones de nidification les plus importantes des États-Unis. Le refuge national de faune d'Archie Carr, une plage protégée de 32 kilomètres, a vu plus de 20 000 tortues vertes pondre cette année. Cependant, les tempêtes plus fortes et la montée des eaux affectent les tortues et leur habitat.
« Chaque année, nous nous préparons à ce que la saison des ouragans va apporter. Ce sont les tortues vertes, du moins en Floride, qui sont les plus durement touchées par ces événements », a précisé Kate Mansfield, professeure à l'Université de Central Florida.
Un avantage inattendu
Les tortues vertes ont un avantage. Certaines pondent leurs œufs plus tard dans l'année, pendant les mois plus frais. Cela permet aux nids d'incuber à des températures plus basses, ce qui pourrait aider à équilibrer les ratios de sexe, car des températures plus chaudes produisent majoritairement des femelles.
Maintenir l'élan de la conservation
Le reclassement de la tortue verte est une bonne nouvelle, mais les scientifiques insistent sur la nécessité de maintenir les efforts de conservation. Katharine Hart, biologiste des tortues marines, craint que le statut de « préoccupation mineure » ne réduise l'incitation à les protéger, notamment dans des lieux comme les îles Turques et Caïques où la pêche légale des tortues existe encore.
Selon elle, ce succès devrait plutôt servir de preuve que la conservation fonctionne. Cela devrait motiver à renforcer les protections des habitats clés, tels que les herbiers marins, les mangroves et les plages, menacés par le développement côtier.
Le rôle vital des tortues vertes
Les tortues vertes sont des herbivores qui paissent les herbiers marins, contribuant à leur santé et à leur croissance. Sur terre, leurs œufs non éclos et leurs coquilles enrichissent les plages, favorisant une végétation de dunes plus forte et des côtes plus résilientes. Leur disparition aurait des répercussions sur les écosystèmes côtiers.
Kate Mansfield avertit qu'il ne faudrait pas longtemps pour anéantir des décennies de progrès si les actions de protection ne se poursuivent pas. « Si tout le monde se dit : 'Hé, nous pouvons recommencer à pêcher les tortues vertes', ou 'Nous pouvons faire les choses différemment', cela pourrait ne pas être dans le meilleur intérêt des tortues marines. Je pense que très rapidement, ces animaux pourraient de nouveau se retrouver sur la liste des espèces en danger. »
Il est crucial de maintenir l'élan de ce succès sur plusieurs générations de tortues. La vigilance reste de mise pour assurer un avenir durable à cette espèce emblématique.





