Alors que la capitale indienne, New Delhi, subit des températures extrêmes, exacerbées par ses surfaces urbaines sombres, des experts soulignent des solutions directes mais souvent négligées. La ville est un four urbain, où le béton et l'asphalte absorbent et rayonnent une chaleur intense. Ce phénomène est aggravé par le changement climatique et la pollution, affectant directement la vie quotidienne des millions d'habitants.
Kiff Gallagher, stratège climatique et directeur exécutif fondateur de la Global Heat Reduction Initiative, affirme que des interventions pratiques comme les toits réfléchissants et les forêts urbaines pourraient offrir un soulagement significatif. Ces mesures sont jugées cruciales pour améliorer la qualité de vie dans les zones urbaines les plus touchées.
Points Clés
- Les surfaces sombres des villes aggravent l'effet d'îlot de chaleur urbain en Inde.
- Les polluants climatiques à courte durée de vie contribuent à près de la moitié du réchauffement mondial.
- Les « toits froids » et les forêts urbaines peuvent réduire considérablement les températures.
- La pollution de l'air a des conséquences graves sur la santé publique, y compris les maladies respiratoires.
- Un réalignement urgent du financement climatique est nécessaire pour cibler les polluants à courte durée de vie.
L'Effet d'Îlot de Chaleur Urbain en Inde
Les zones urbaines denses, comme Delhi, connaissent des températures nettement plus élevées que les communautés environnantes. Ce phénomène est dû aux matériaux de construction de la ville. Les surfaces sombres, telles que l'asphalte et le béton, absorbent une grande quantité de chaleur solaire. Elles la réémettent ensuite, augmentant la température ambiante.
Cet effet d'îlot de chaleur urbain est intensifié par le changement climatique global et la pollution atmosphérique. Il crée des environnements difficiles pour les résidents, en particulier pendant les mois d'été. Selon Kiff Gallagher, ces zones urbaines sont des "points chauds" où la souffrance est immédiate.
« La chaleur croissante en Inde affecte gravement les points chauds urbains, comme Delhi. Comparées aux communautés environnantes, ces zones urbaines denses, caractérisées par des surfaces sombres et absorbant la chaleur comme l'asphalte et le béton, connaissent des températures significativement plus élevées. »
Kiff Gallagher, stratège climatique
Les solutions ne sont pas toujours complexes. Des mesures "étonnamment simples et malheureusement négligées" pourraient apporter un soulagement. Ces interventions incluent l'utilisation de matériaux réfléchissants et la plantation d'arbres.
Fait intéressant
Seule la moitié du réchauffement climatique est causée par le dioxyde de carbone. L'autre moitié est due aux polluants climatiques à courte durée de vie, souvent sous-estimés dans les modèles actuels.
Impact des Polluants à Courte Durée de Vie
Les polluants à courte durée de vie (SLCPs), comme le carbone noir, le méthane et les hydrofluorocarbones (HFCs), sont des contributeurs majeurs au réchauffement climatique. Certains de ces polluants peuvent être des milliers de fois plus puissants que le dioxyde de carbone en termes de potentiel de réchauffement. Ils agissent rapidement dans l'atmosphère, provoquant un impact immédiat sur les températures.
Les HFCs, par exemple, sont souvent utilisés comme réfrigérants. Leur libération dans l'atmosphère contribue de manière significative à l'effet de serre. Réduire ces émissions est essentiel pour obtenir un soulagement rapide de la chaleur extrême.
Contexte
L'Asie du Sud a traditionnellement bénéficié du refroidissement naturel des montagnes de l'Himalaya. Cependant, la pollution atmosphérique, notamment la suie et le smog, assombrit maintenant la neige et la glace, réduisant leur capacité à réfléchir la lumière du soleil et aggravant la fonte des glaciers.
Malgré leur rôle important dans le réchauffement global, seulement 5 % du financement climatique mondial est alloué à la mitigation de ces polluants. Kiff Gallagher appelle à un "réalignement dramatique" des fonds. Il estime que cette disparité doit être corrigée pour des actions efficaces.
Solutions Simples pour Refroidir les Villes
Les "toits froids" et autres surfaces traitées pour réfléchir la lumière du soleil peuvent réduire les températures locales jusqu'à 4 degrés Celsius (7,2 degrés Fahrenheit). Ces surfaces, dites à haute albédo, renvoient le soleil dans l'espace plutôt que de l'absorber. C'est une stratégie efficace et abordable pour les villes comme Delhi.
L'intégration de forêts urbaines représente une autre solution puissante. La plantation d'arbres peut abaisser les températures de surface de jusqu'à 13 degrés Celsius dans une ville. Les arbres fournissent de l'ombre et libèrent de l'humidité, contribuant au refroidissement de l'environnement.
- Toits réfléchissants : Réduisent l'absorption de chaleur des bâtiments.
- Forêts urbaines : Offrent de l'ombre et un refroidissement par évapotranspiration.
- Peintures réfléchissantes : Appliquées sur les habitations pour diminuer la chaleur intérieure.
Les régions de l'Himalaya, qui servaient de "refroidisseur naturel" pour l'Asie du Sud, sont maintenant menacées. La suie et le smog transportés par les vents ont noirci la glace, réduisant sa capacité de réflexion. Cela contribue à la fonte des glaciers, à la contamination de l'eau et à l'élévation du niveau de la mer.
L'Impact de la Pollution Atmosphérique sur la Santé
L'air de Delhi est régulièrement saturé d'un mélange toxique d'émissions de véhicules et d'industries. Cette situation s'aggrave en hiver en raison de la combustion des résidus de récolte dans les États voisins. Les conséquences pour la santé publique sont graves : décès prématurés, maladies respiratoires et autres affections.
Virinder Sharma, membre technique de la Commission pour la gestion de la qualité de l'air de Delhi, décrit la crise comme "silencieuse, invisible et diffuse". Il n'y a pas de "certificat de décès pour la pollution de l'air", ce qui rend difficile la pleine appréciation de son impact.
Atteindre l'objectif du Programme National Indien pour un Air Propre, qui vise à réduire les particules de 40 % dans 131 villes d'ici 2025-2026, pourrait apporter des avantages considérables pour la santé. Une étude récente de l'Institut Indien de Technologie de Delhi et du cabinet de conseil Climate Trends a mis en lumière ces bénéfices potentiels.
Bénéfices de la Réduction de la Pollution
Une réduction de 40% des particules fines pourrait entraîner une diminution d'un quart de la prévalence du diabète dans les États les plus touchés, et jusqu'à 12% pour l'hypertension. Les enfants des plaines indo-gangétiques verraient une baisse des infections respiratoires, de l'anémie et des faibles poids à la naissance.
Pour Aarti Khosla, directrice de Climate Trends, la santé publique doit être au centre des préoccupations en matière de mitigation de la qualité de l'air. Elle souligne que la dimension sociale de la pollution, en tant que problème de santé publique, a parfois été éclipsée par les discussions scientifiques et climatiques.
Agriculture et Émissions de Méthane
L'agriculture est une source majeure de méthane, en particulier les rizières. Elles génèrent environ 12 % des émissions de méthane d'origine humaine en raison de leurs conditions gorgées d'eau et pauvres en oxygène. Des pratiques agricoles modifiées peuvent réduire ces émissions.
Kiff Gallagher suggère des techniques comme l'alternance d'humidification et de séchage dans la culture du riz. Éviter la combustion à ciel ouvert des résidus de récolte est également crucial. Malgré les efforts du gouvernement, de nombreux agriculteurs du nord de l'Inde continuent de brûler les résidus après la mousson, considérant cela comme le moyen le moins cher de préparer les champs.
Les animaux d'élevage, en particulier les bovins, produisent aussi des émissions de méthane. Des interventions à faible coût existent, comme des machines communautaires pour décomposer le fumier dans des environnements sans oxygène. Ces systèmes peuvent générer du biogaz pour la cuisine, réduisant ainsi les émissions nocives.
Autres Mesures d'Atténuation
La distribution de lanternes solaires et de cuisinières plus propres aux familles rurales peut également améliorer la qualité de l'air. Beaucoup de familles dépendent encore du charbon et du bois pour la cuisine et le chauffage en hiver. Cette pratique contribue de manière significative à la pollution de l'air extérieur et pose un risque direct pour la santé des femmes et des enfants.
« De nombreuses familles utilisent encore la biomasse pour la cuisine et parfois pour le chauffage pendant les mois d'hiver. Cela contribue de manière significative à la pollution de l'air extérieur, en plus d'être un risque direct pour les femmes et les enfants. »
Soumya Swaminathan, présidente de la MS Swaminathan Research Foundation
En fin de compte, Kiff Gallagher insiste sur une approche plus sophistiquée de la mesure et de la gestion des polluants. Réduire la chaleur à court terme est toujours préférable pour "réduire les risques plus tôt et prévenir la catastrophe".





