Une nouvelle étude scientifique révèle que le projet gazier de Scarborough, développé par Woodside au large de la côte ouest-australienne, pourrait entraîner des conséquences climatiques graves. Les émissions liées à ce projet de 16,5 milliards de dollars pourraient causer la mort d'au moins 480 personnes et exposer plus d'un demi-million de personnes à des chaleurs extrêmes sans précédent. Ces recherches mettent en lumière l'impact significatif des projets individuels d'énergies fossiles sur le réchauffement global.
Points Clés
- Le projet Scarborough pourrait provoquer au moins 480 décès liés à la chaleur.
- Plus de 516 000 personnes seraient exposées à des températures inédites.
- Le réchauffement induit par Scarborough contribuerait à la perte de 16 millions de colonies de coraux par événement de blanchiment dans la Grande Barrière de Corail.
- Le projet émettrait 876 millions de tonnes de CO2 sur trois décennies.
- Sa contribution au réchauffement global est estimée à 0,00039°C.
Évaluation des Impacts Climatiques du Projet Scarborough
Des scientifiques de six universités ont analysé l'empreinte climatique du projet Scarborough. Ce projet, dont la production devrait débuter l'année prochaine au large de la côte nord-ouest de l'Australie, est prévu pour durer trois décennies. Les estimations indiquent une libération totale de 876 millions de tonnes de dioxyde de carbone dans l'atmosphère sur cette période.
Les chercheurs estiment que les émissions du projet contribueraient à un réchauffement global de 0,00039°C. Ce chiffre peut sembler minime, mais l'étude utilise des techniques d'attribution climatique récemment développées pour en évaluer les conséquences concrètes et mesurables.
Chiffres Clés
- 876 millions de tonnes de CO2 : émissions totales prévues sur 30 ans.
- 0,00039°C : contribution estimée au réchauffement global.
- 516 000 personnes : nombre additionnel de personnes exposées à une chaleur sans précédent.
- 16 millions : colonies de coraux supplémentaires perdues dans la Grande Barrière de Corail par événement de blanchiment.
Conséquences sur la Santé Humaine et les Écosystèmes
Grâce aux techniques d'attribution climatique, cette fraction de réchauffement est associée à des impacts directs. Elle exposerait 516 000 personnes supplémentaires à l'échelle mondiale à une chaleur inédite. De plus, elle entraînerait la perte de 16 millions de colonies de coraux additionnelles dans la Grande Barrière de Corail lors de chaque futur événement de blanchiment.
L'étude souligne également que 356 000 personnes seraient poussées hors de la « niche climatique humaine ». Cette niche représente la zone raisonnable pour la survie humaine, avec une limite supérieure de température annuelle moyenne fixée à 29°C. Dépasser ce seuil rend la vie beaucoup plus difficile et dangereuse pour les populations.
« Souvent, l'argument avancé pour les projets individuels impliquant des émissions de gaz à effet de serre est qu'ils sont assez petits [dans le contexte mondial]. Mais en réalité, surtout avec les grands projets de combustibles fossiles, nous pouvons très clairement affirmer que les impacts ne sont pas négligeables », a déclaré Andrew King, professeur agrégé en sciences du climat à l'Université de Melbourne et co-auteur de l'étude.
Un Nouvel Outil d'Évaluation des Risques Climatiques
L'étude, publiée dans la revue Climate Action, s'inscrit dans une nouvelle orientation de la science climatique. Cette approche vise à quantifier les impacts précis des projets individuels d'énergies fossiles et des émetteurs. Elle permet de lier des événements climatiques spécifiques à des sources d'émissions particulières.
Contexte de l'Étude
Cette recherche utilise le modèle de la Réponse Climatique Transitoire aux Émissions de CO2 (TCRE), un outil également employé par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). Le TCRE estime que 1 000 gigatonnes d'émissions de CO2 entraînent un réchauffement global supplémentaire de 0,45°C. La contribution de Scarborough au réchauffement global est estimée dans une fourchette probable de 0,00024°C à 0,00055°C, bien qu'une mesure directe à ce niveau de précision ne soit pas possible.
Un porte-parole de Woodside a indiqué que l'entreprise s'engageait à réduire les « émissions directes de gaz à effet de serre du projet Scarborough au niveau le plus bas raisonnablement réalisable ». Cela inclurait l'intégration de mesures d'efficacité énergétique dans la conception et les opérations.
Cependant, le porte-parole a également ajouté que « le changement climatique est causé par la concentration nette globale de gaz à effet de serre dans l'atmosphère. Il ne peut être attribué à un seul événement, pays, industrie ou activité. » Cette position contraste avec les conclusions des chercheurs qui mettent en évidence les impacts tangibles des projets individuels.
Implications à Long Terme et Décès Liés à la Chaleur
Les calculs des chercheurs montrent que, selon un scénario d'émissions intermédiaire, le réchauffement causé par Scarborough pourrait entraîner 484 décès supplémentaires liés à la chaleur en Europe d'ici la fin du siècle. En tenant compte d'une réduction des décès liés au froid dans cette région, la contribution nette est estimée à 118 décès supplémentaires.
Sarah Perkins-Kirkpatrick, professeure en sciences du climat à l'Université Nationale Australienne et co-autrice de l'étude, a souligné un autre aspect crucial. Compte tenu des objectifs de réduction des émissions de l'Australie, le projet Scarborough représenterait une part croissante du budget carbone du pays dans les décennies à venir.
« D'ici 2049, en supposant que le projet Scarborough émette la même quantité chaque année, il consommera la moitié de notre budget d'émissions », a déclaré Perkins-Kirkpatrick. « C'est ce que nous brûlons ici, sans parler de ce que nous exportons à l'étranger. »
Au-delà de 2050, les émissions de Scarborough nécessiteraient l'élimination du CO2 de l'atmosphère. Cela impliquerait des « technologies qui n'existent pas encore, ou que nous ne pouvons pas développer à grande échelle », a-t-elle ajouté. Cela soulève des questions sur la faisabilité et la durabilité à long terme du projet.
Un Outil pour la Prise de Décision
Les chercheurs estiment que cette approche pourrait être utilisée par les gouvernements et les entreprises. Elle permettrait d'évaluer si les futurs projets « se situent dans des niveaux acceptables de risque environnemental et sociétal ». Andrew King a suggéré que cet outil « pourrait faire partie du processus de détermination de l'approbation d'un projet ».
Yuming Guo, professeur de santé environnementale mondiale et de biostatistique à l'Université Monash, qui n'a pas participé à l'étude, a salué cette recherche. Il a déclaré qu'elle offrait « un outil précieux pour mener des évaluations des risques environnementaux ».
Impact Cumulatif
« Compte tenu du grand nombre de projets de combustibles fossiles en exploitation dans le monde, la contribution cumulative de ces émissions au changement climatique est substantielle et ne doit pas être négligée », a ajouté le professeur Guo.
Dr Kat O'Mara, maître de conférences en gestion et durabilité environnementales à l'Université Edith Cowan, a également commenté l'étude. Elle a noté que « l'avis consultatif de la Cour internationale de Justice il y a quelques mois, selon lequel les pays doivent agir pour protéger le climat, renforce la nécessité de considérer les impacts climatiques au-delà de la seule quantité de carbone produite. »
Cette recherche met en évidence la nécessité d'une évaluation plus rigoureuse des projets d'énergies fossiles. Elle souligne l'importance de considérer leurs impacts cumulatifs et individuels sur le climat et la santé humaine.





