Une expédition scientifique audacieuse a débuté en Antarctique. Deux explorateurs français, la glaciologue Heidi Sevestre et l'aventurier Matthieu Tordeur, se sont lancés dans une mission de trois mois. Leur objectif est de traverser une partie du continent à ski cerf-volant pour collecter des échantillons de glace vieille de 130 000 ans. Cette recherche vise à mieux comprendre les mécanismes du passé pour anticiper les impacts du réchauffement climatique sur le niveau des mers.
Points Clés
- Mission de trois mois en Antarctique pour étudier la glace ancienne.
- Parcours de 4 000 kilomètres à ski cerf-volant.
- Collecte d'échantillons de glace de 130 000 ans.
- Objectif : comprendre l'impact du réchauffement climatique sur le niveau des mers.
- L'expédition coïncide avec la conférence COP30 pour sensibiliser au changement climatique.
Une Aventure Scientifique au Cœur de l'Extrême
L'expédition, nommée « Under Antarctica », est à la fois une prouesse d'aventure et un projet scientifique ambitieux. Heidi Sevestre, glaciologue de renommée mondiale, a souligné l'importance de cette approche combinée. Les deux explorateurs ont quitté l'Afrique du Sud le 29 octobre pour la base antarctique de Novolazarevskaya. Le timing de cette mission coïncide avec le début de l'été austral et la conférence climatique COP30 qui se tiendra au Brésil à partir du 10 novembre. L'objectif est de galvaniser les efforts mondiaux contre le réchauffement climatique.
Le défi est immense. En complète autonomie, Matthieu Tordeur et Heidi Sevestre prévoient de parcourir environ 4 000 kilomètres. Ils devront affronter des températures pouvant chuter jusqu'à moins 50 degrés Celsius. Chaque explorateur tirera une pulka contenant tout le nécessaire : nourriture, équipement et deux radars à pénétration de sol pour scanner la glace en profondeur. La planification est méticuleuse, incluant un tableau détaillé de chaque repas et de son poids.
Le Continent des Extrêmes
- L'Antarctique est le continent le plus froid, le plus sec et le plus venteux de la planète.
- C'est aussi le continent le plus élevé, avec des altitudes atteignant 3 800 mètres sur le parcours de l'expédition.
- À l'intérieur du continent, il n'y a aucune vie animale ni humaine, seulement une vaste étendue blanche.
Ski Cerf-Volant : Un Mode de Déplacement Efficace
Pour couvrir une telle distance, le duo utilise des skis cerf-volant. Ce système permet aux skieurs, équipés d'un harnais relié à un cerf-volant, d'être tirés par le vent. « Nous pouvons parcourir, si les conditions sont bonnes, 150, voire 200 kilomètres par jour », a expliqué Matthieu Tordeur. Cette technique de déplacement polaire a déjà été testée avec succès l'année dernière. Ils ont alors parcouru 1 500 kilomètres au Groenland en un mois, collectant déjà des échantillons de glace.
Cette fois, l'objectif est de compléter les 4 000 kilomètres en environ 90 jours. La fenêtre est étroite : « Nous devrons quitter l'Antarctique fin janvier, car après cela, il n'y a plus d'avions ni de logistique pour nous aider », a précisé Matthieu Tordeur, qui explore les régions polaires depuis une décennie. Sa connaissance des environnements extrêmes est un atout crucial pour la survie et le succès de l'expédition.
« C'est une expédition très pionnière qui combine beaucoup d'aventure, mais aussi une science vraiment ambitieuse. » — Heidi Sevestre, glaciologue.
Recherche de Glace Ancienne pour Anticiper l'Avenir
Le cœur de la mission scientifique réside dans la recherche de glace très profonde et très ancienne. « Nous sommes vraiment intéressés à essayer de trouver de la glace très profonde et très ancienne… entre deux et trois kilomètres de profondeur », a détaillé Heidi Sevestre. Cette glace remonte à environ 130 000 ans. À cette époque, le climat terrestre était environ trois degrés plus chaud qu'aujourd'hui. C'est une température que notre planète pourrait retrouver d'ici la fin du siècle si le réchauffement climatique n'est pas maîtrisé.
L'étude de ces couches de glace anciennes entre l'Antarctique oriental et occidental est cruciale. Elle permettra de déterminer si certaines parties du continent se sont effondrées lorsque le climat était plus chaud. « Si, à un moment donné, nous ne trouvons pas de glace datant de plus de 130 000 ans, cela signifiera que certaines parties de l'Antarctique se sont effondrées lorsque le climat était à plus trois degrés », a expliqué Sevestre. Ces données sont essentielles pour affiner les modèles de prévision de l'élévation du niveau de la mer.
L'Enjeu de l'Antarctique Occidental
L'Antarctique occidental contient suffisamment de glace pour élever le niveau des mers de quatre, cinq, voire six mètres. Un effondrement de cette masse glaciaire aurait des conséquences catastrophiques à l'échelle mondiale, déplaçant des centaines de millions de personnes.
Un Message pour la COP30 et le Monde
Matthieu Tordeur et Heidi Sevestre espèrent que le message de leur mission, soutenue par l'UNESCO, atteindra les dirigeants mondiaux réunis au Brésil. L'objectif est de souligner l'urgence d'agir contre le changement climatique. « Il n'est pas trop tard pour éviter les pires conséquences du changement climatique », a affirmé Heidi Sevestre. Elle insiste sur les solutions existantes.
« Nous savons ce que nous devons faire pour préserver ces masses de glace : nous devons décarboner et nous devons utiliser moins de combustibles fossiles », a-t-elle ajouté. Cette expédition n'est donc pas seulement une quête scientifique, mais aussi un puissant plaidoyer pour l'action climatique. Les données recueillies contribueront directement à une meilleure compréhension des risques futurs et à l'élaboration de stratégies d'adaptation et d'atténuation. La science et l'aventure s'unissent pour alerter sur l'avenir de notre planète.





