Au cœur du désert de Karakoum, au Turkménistan, un phénomène naturel connu sous le nom de « Portes de l'Enfer » touche à sa fin. Le cratère de Darvaza, un gouffre enflammé qui brûle depuis un demi-siècle, émettant du méthane, un puissant gaz à effet de serre, est sur le point d'être éteint. Cette décision intervient après des années de fascination et d'attraction touristique, alors que les autorités cherchent à réduire l'impact environnemental et à récupérer des ressources gazières précieuses.
Points Clés
- Le cratère de Darvaza brûle depuis plus de 50 ans, émettant du méthane.
- Le méthane est un gaz à effet de serre puissant, contribuant au réchauffement climatique.
- Le Turkménistan vise à éteindre les flammes pour des raisons environnementales et économiques.
- La fermeture pourrait affecter le tourisme local, le cratère étant une attraction majeure.
L'Impact Environnemental du Méthane
Le méthane est un contributeur majeur au changement climatique. Il est responsable d'environ 30 % du réchauffement climatique depuis le début de la révolution industrielle. Ce gaz est bien plus efficace que le dioxyde de carbone pour piéger la chaleur dans l'atmosphère. Sa gestion est donc cruciale dans la lutte contre le réchauffement global.
Le Turkménistan, bien que plus petit que des émetteurs majeurs comme les États-Unis et la Chine, détient un triste record en matière de super-émissions de méthane, selon un rapport de l'Agence Internationale de l'Énergie (AIE) de 2024. Le cratère de Darvaza, bien qu'il ne représente qu'une part mineure de ces émissions nationales, symbolise les défis environnementaux plus larges du pays.
Fait Intéressant
Le méthane a un potentiel de réchauffement global (PRG) environ 28 à 34 fois plus élevé que le CO2 sur une période de 100 ans, bien qu'il reste moins longtemps dans l'atmosphère.
Motivations Économiques et Politiques
La décision d'éteindre les flammes n'est pas uniquement motivée par des considérations environnementales. L'économie du Turkménistan dépend fortement de ses vastes réserves de gaz naturel. Le président Gurbanguly Berdimuhamedov a ordonné l'extinction du cratère afin de protéger l'environnement et les intérêts économiques du pays. Il a souligné la perte de ressources précieuses qui pourraient autrement bénéficier à la population turkmène.
Le potentiel de profits issus de l'exportation de gaz représente une incitation économique forte pour stopper cette combustion continue. Selon les estimations, des millions de dollars de gaz sont perdus chaque année en raison de ces flammes.
« La perte de ressources gazières précieuses a un impact négatif sur le développement économique du pays et sur le bien-être de notre peuple », a déclaré le président Berdimuhamedov, soulignant l'urgence de cette intervention.
Les Défis Techniques de l'Extinction
L'effort pour contrôler le cratère de Darvaza est complexe. La compagnie publique turkmène Turkmengaz a rapporté avoir réussi à réduire l'intensité des flammes de plus de trois quarts. Cependant, la géologie unique du désert de Karakoum complique ces efforts. Le sous-sol du désert est caractérisé par de nombreuses couches minces d'hydrocarbures, intercalées avec des strates denses contenant de l'eau. Cette complexité géologique a prolongé la combustion du cratère, car ces couches continuent d'alimenter le feu en combustible.
Malgré les progrès annoncés par Turkmengaz, la tâche reste difficile. L'entreprise vise à isoler complètement la surface du cratère une fois que le flux de gaz aura diminué, stoppant ainsi les émissions incontrôlées. Toutefois, le manque de transparence et d'accès aux opérations de Turkmengaz soulève des questions sur la faisabilité et la précision de ces affirmations. Les informations sont étroitement contrôlées par les autorités turkmènes, rendant difficile toute vérification indépendante.
Contexte Historique
Le cratère de Darvaza a été créé accidentellement en 1971 par des géologues soviétiques lors d'une opération de forage. Craignant la propagation de gaz toxiques, ils ont décidé d'y mettre le feu, pensant qu'il s'éteindrait en quelques semaines. Il a brûlé sans interruption depuis.
Un Coup Dur pour le Tourisme Local
Le cratère de Darvaza est une attraction touristique unique depuis sa création accidentelle. Anatoly Bouchmakine, un scientifique turkmène de 90 ans, se souvient comment l'accident initial a conduit à la combustion continue du site. Si l'incident a fourni des informations précieuses sur les réserves de gaz de la région, il a également créé un point de repère emblématique dans un pays par ailleurs isolé.
La fermeture potentielle de Darvaza pose des défis importants pour l'industrie touristique naissante du Turkménistan. Le pays, en grande partie désertique, offre peu d'attractions touristiques comparé à ses voisins. Pour le nombre limité de visiteurs étrangers qui parviennent à obtenir un visa, le cratère enflammé est une destination incontournable. Les agences de voyage locales, comme celle employant Ovez Mouradov, craignent l'impact économique de la perte d'une telle attraction.
- Impact sur les revenus : La cessation des flammes pourrait entraîner des pertes de revenus importantes pour de nombreuses entreprises dépendant du tourisme.
- Attractivité réduite : Le Turkménistan, déjà peu visité, perdrait l'une de ses principales raisons d'attirer les touristes internationaux.
- Reconversion nécessaire : Les opérateurs touristiques devront trouver de nouvelles attractions ou adapter leurs offres.
Selon Ovez Mouradov, la suppression de cette attraction emblématique pourrait réduire le nombre de touristes de 20 à 30 %, affectant directement les guides, les chauffeurs et les hébergements locaux.
L'Avenir de l'Environnement et de l'Économie au Turkménistan
La décision d'éteindre le cratère de Darvaza reflète l'équilibre délicat que le Turkménistan doit trouver entre la responsabilité environnementale et la nécessité économique. Les dirigeants du pays doivent gérer les défis liés à la réduction des émissions de méthane tout en maximisant les avantages économiques de leurs ressources naturelles. Cette initiative pourrait marquer un tournant vers une approche plus durable de la gestion des ressources, s'alignant sur les efforts mondiaux de lutte contre le changement climatique.
Cependant, l'opacité entourant les politiques environnementales et les pratiques industrielles du Turkménistan complique l'évaluation des progrès. Alors que le pays prend des mesures pour réduire son impact environnemental, les communautés locales et internationales observeront attentivement. Le cratère de Darvaza, autrefois un symbole ardent de négligence environnementale, pourrait devenir un témoignage de l'engagement du Turkménistan envers un avenir durable. Cette initiative ouvrira-t-elle la voie à des réformes environnementales plus larges au Turkménistan ?





