Le Canada est en difficulté pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions de carbone d'ici 2030. Un nouveau rapport de l'Institut climatique canadien (ICC) révèle que le pays n'a presque pas réduit ses émissions en 2024. Cette situation met en péril les engagements climatiques du Canada et rend plus difficile l'atteinte des objectifs futurs.
Points Clés
- Le Canada n'a presque pas réduit ses émissions de carbone en 2024.
- Les émissions du secteur pétrolier et gazier ont augmenté de 1,9 % en 2024.
- Le pays est loin de son objectif de réduction de 40-45 % d'ici 2030.
- Le non-respect des objectifs pourrait entraîner des conséquences juridiques et environnementales.
- Les experts appellent à un retour des politiques environnementales fortes.
Progrès insuffisants en matière d'émissions
Le rapport de l'ICC, publié jeudi, présente des estimations préliminaires des émissions canadiennes pour 2024. Ces données montrent une stagnation par rapport à l'année précédente. Le pays a besoin de réduire ses émissions de manière significative pour respecter ses engagements.
Les émissions du secteur pétrolier et gazier, qui représentent 31 % du total canadien, ont même augmenté de 1,9 %. Les sables bitumineux ont vu leurs émissions croître de 3,4 %. Le transport, responsable de 23 % des émissions, n'a diminué que de 0,1 %. Ceci indique un manque de progrès notable.
Faits Rapides
- 31 %: Part des émissions du secteur pétrolier et gazier au Canada.
- 23 %: Part des émissions du secteur des transports.
- 8,5 %: Réduction totale des émissions par rapport à 2005, loin de l'objectif de 40-45 %.
Objectifs climatiques et réalité actuelle
Le Canada s'est engagé à réduire ses émissions de 40 à 45 % par rapport aux niveaux de 2005 d'ici 2030. Cet objectif fait partie d'un plan plus large visant la neutralité carbone d'ici 2050. La Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité encadre ces engagements.
Toutefois, l'ICC estime que les émissions de carbone en 2024 se sont élevées à 694,3 mégatonnes. Cela représente une réduction de seulement 8,5 % par rapport à 2005. Ce chiffre est bien en deçà de la trajectoire nécessaire pour atteindre l'objectif de 2030.
« Nous aurions besoin de réductions de l'ordre de 40 mégatonnes par an, chaque année. C'est bien au-delà de ce qui peut être réalisé avec les politiques que nous avons aujourd'hui, » a déclaré Ross Linden-Fraser, chercheur principal au projet 440 Mégatonnes de l'ICC.
Il ajoute que chaque objectif manqué rend plus difficile l'atteinte des suivants. « Manquer l'objectif de 2030 rendrait plus difficile l'atteinte des objectifs futurs, mais c'est une raison de plus de faire tout ce que nous pouvons maintenant. Les objectifs futurs ne sont pas hors de portée, mais les gouvernements devraient saisir cette opportunité pour corriger le tir. »
Politiques environnementales en recul et leurs conséquences
Le rapport et les experts soulignent que le Canada a connu des reculs dans ses politiques environnementales en 2025. Cette situation est en partie due à l'incertitude économique internationale. Des changements de politique incluent la fin de la taxe carbone controversée du Canada et des subventions provinciales et fédérales pour les véhicules électriques.
Contexte
Les politiques environnementales peuvent être influencées par des facteurs économiques et politiques mondiaux. Les décisions concernant les taxes carbone et les subventions aux véhicules électriques ont un impact direct sur la capacité du pays à réduire ses émissions. Le contexte économique international peut parfois détourner l'attention des objectifs climatiques à long terme.
Mark Winfield, coordinateur du programme de maîtrise en études environnementales à l'Université York, explique que le Canada ne peut pas être légalement sanctionné pour ne pas avoir atteint les objectifs de l'Accord de Paris. Cependant, le pays pourrait être responsable en vertu de la Loi sur la responsabilité en matière de carboneutralité.
« Il pourrait y avoir la possibilité d'une sorte de litige s'ils ne parviennent pas à atteindre les objectifs d'ici 2030 en vertu de la Loi sur la responsabilité en matière de carboneutralité, » a-t-il précisé. « Mais la plupart des mécanismes d'application sont essentiellement des rapports, et la même chose s'applique en vertu de l'Accord de Paris. »
Le non-respect des objectifs indique une mauvaise direction dans la lutte contre le changement climatique. Les feux de forêt intenses observés cet été, notamment dans le centre du pays et affectant la qualité de l'air à Toronto, sont des signes avant-coureurs. « Ce que nous voyons avec les feux de forêt n'est que le début, » a averti Winfield.
Appels à l'action et opportunités économiques
Malgré l'orientation actuelle vers l'économie, les chercheurs espèrent que ces nouvelles conclusions serviront de signal d'alarme. Ils appellent tous les niveaux de gouvernement à investir davantage dans les politiques environnementales. L'ICC publiera bientôt une nouvelle étude avec des recommandations. Celles-ci incluront le retour de la taxe carbone et des incitations pour les véhicules électriques.
« C'est difficile de manquer un objectif, mais il vaut toujours la peine de faire ce que nous pouvons. Chaque tonne d'émissions que nous gardons hors de l'atmosphère réduit les impacts du changement climatique, cela fait une différence, » a affirmé Linden-Fraser.
Jose Etcheverry, professeur à l'Initiative pour l'énergie durable à l'Université York, souligne que l'échec possible des objectifs de 2030 fait suite à un précédent échec. Le Canada n'avait pas atteint un objectif du Protocole de Kyoto en 1998, qui visait à réduire les émissions de 6 % par rapport à 1990.
Etcheverry suggère que la solution pourrait être d'intégrer une composante durable dans tous les projets gouvernementaux. Par exemple, les plans de construction de logements abordables devraient inclure des équipements écologiques comme les panneaux solaires et les pompes à chaleur.
Il insiste également sur le fait que l'investissement dans les pratiques durables peut stimuler l'économie. Les secteurs des énergies renouvelables, par exemple, créent plus d'emplois. « Investissons dans l'éco-logement, l'éco-énergie, l'éco-transport. Les innovations liées à la durabilité sont des créatrices d'emplois de plus grande importance que les technologies et les secteurs qui détruisent la planète. »
Selon une étude américaine, la conservation et les énergies renouvelables sont à forte intensité de main-d'œuvre. Elles génèrent plus d'emplois que l'énergie nucléaire et les combustibles fossiles. Le Canada a l'opportunité de devenir un leader mondial en protégeant la planète tout en renforçant son économie.





