Une nouvelle étude révèle que le dégel rapide du pergélisol, bien que souvent associé à la libération de carbone, accélère également le cycle du phosphore dans les sols. Ce processus pourrait potentiellement compenser une partie de la libération de carbone, impactant ainsi la productivité primaire des écosystèmes et la séquestration du carbone dans les régions arctiques.
Points Clés
- Le dégel abrupt du pergélisol accélère le cycle du phosphore dans le sol.
- Cette accélération augmente la mobilisation du phosphore et son absorption par les plantes.
- Le phénomène peut améliorer la productivité primaire et la séquestration du carbone.
- Les changements dans la morphologie des racines et l'exsudation racinaire jouent un rôle crucial.
- Ces découvertes sont essentielles pour prédire le destin du carbone du pergélisol.
Impact inattendu du dégel sur le cycle du phosphore
Le dégel du pergélisol est une préoccupation majeure pour le climat mondial. Il transforme des réservoirs de carbone stables en sources potentielles de gaz à effet de serre. Cependant, les recherches récentes montrent une dynamique plus complexe. L'équipe du professeur Yang Yuanhe, de l'Institut de Botanique de l'Académie Chinoise des Sciences, a identifié un effet secondaire significatif.
Leurs travaux, publiés dans Nature Climate Change, démontrent que le dégel rapide du pergélisol ne se limite pas à la libération de carbone. Il intensifie également le cycle du phosphore dans le sol. Cette découverte est cruciale pour comprendre l'équilibre des écosystèmes arctiques face au réchauffement climatique.
Le saviez-vous ?
Le pergélisol couvre environ 24% des terres émergées de l'hémisphère nord. Il contient une quantité massive de carbone organique, estimée à près de deux fois le carbone actuellement dans l'atmosphère.
Mécanismes d'accélération du phosphore
Les chercheurs ont mené des échantillonnages à grande échelle. Ils ont travaillé sur une coupe transversale du pergélisol du plateau Tibétain. Ils ont utilisé des techniques avancées comme la spectroscopie par résonance magnétique nucléaire 31P, le marquage 33P et le séquençage métagénomique.
Les résultats ont montré une augmentation des taux de mobilisation du phosphore dans le sol. L'absorption du phosphore par les plantes a également augmenté après l'effondrement du pergélisol. Cette mobilisation accrue est liée à une plus grande abondance de gènes fonctionnels impliqués dans le cycle du phosphore.
« Notre étude fournit des preuves claires que le dégel abrupt du pergélisol accélère le cycle du phosphore dans le sol », a déclaré un membre de l'équipe de recherche.
Rôle des plantes et des micro-organismes
L'étude souligne également l'importance des changements dans la morphologie des racines des plantes. L'exsudation racinaire, soit la libération de composés organiques par les racines, augmente. Cette exsudation aide les plantes à acquérir plus de nutriments. La compétition microbienne avec les plantes pour le phosphore diminue également après le dégel.
Ces facteurs combinés permettent aux plantes de mieux accéder au phosphore. Le phosphore est un nutriment essentiel pour leur croissance. Une meilleure disponibilité du phosphore peut stimuler la productivité primaire de l'écosystème.
Contexte climatique
Le réchauffement climatique entraîne un dégel accéléré du pergélisol, notamment dans les régions arctiques et subarctiques. Ce phénomène a des implications majeures pour les cycles biogéochimiques globaux et le bilan carbone de la planète.
Conséquences sur la séquestration du carbone
Traditionnellement, le dégel du pergélisol est vu comme un facteur aggravant du réchauffement climatique, en raison de la libération de carbone. Cependant, cette nouvelle recherche suggère une nuance importante. L'accélération du cycle du phosphore peut en partie compenser cette libération.
En augmentant la productivité primaire des écosystèmes, le dégel favorise la croissance des plantes. Les plantes absorbent le dioxyde de carbone de l'atmosphère par la photosynthèse. Cela conduit à une meilleure séquestration du carbone dans la biomasse végétale et le sol.
- Meilleure croissance des plantes : L'accès accru au phosphore permet aux plantes de se développer plus efficacement.
- Absorption de CO2 : Une végétation plus dense signifie une plus grande absorption de CO2 atmosphérique.
- Séquestration du carbone : Le carbone est stocké dans la biomasse végétale et les sols, réduisant ainsi sa concentration dans l'atmosphère.
Perspectives pour les modèles climatiques
Ces découvertes sont vitales pour améliorer la précision des modèles climatiques. La compréhension du rôle du phosphore est essentielle pour des prévisions plus justes sur l'évolution du carbone du pergélisol. Les stratégies de mitigation des impacts climatiques dans les régions sensibles pourraient également être ajustées.
Jusqu'à présent, de nombreux modèles climatiques sous-estimaient l'interaction complexe entre le carbone, le phosphore et d'autres nutriments. Cette étude met en lumière une rétroaction positive. Le dégel, tout en libérant du carbone, peut aussi stimuler un processus qui le piège à nouveau.
Ceci ne signifie pas que le dégel du pergélisol est sans danger. Il reste un facteur de risque majeur pour le climat. Cependant, cette recherche offre une perspective plus nuancée. Elle montre que les écosystèmes peuvent avoir des mécanismes d'adaptation ou de compensation inattendus.
Des recherches supplémentaires sont nécessaires. Elles devront confirmer l'ampleur de cet effet compensateur à l'échelle mondiale. Elles devront aussi explorer comment d'autres nutriments pourraient interagir dans ce processus. Ces travaux contribuent à une meilleure compréhension des boucles de rétroaction complexes du système climatique terrestre.





